Comme nous l'avons déjà développé à diverses reprises, les mots, les expressions caractérisant le programme communiste ne sont pas "neutres", "innocentes", voire inimportantes... La force avec laquelle la contre-révolution a dû s'acharner pour dénaturer certaines expressions -patrimoine collectif de notre classe- nous démontre -a contrario- l'importance de la lutte pour la restauration subversive du contenu révolutionnaire de nos expressions, ainsi que la nécessité de déblayer de notre vocabulaire tous les concepts produits directs de la contre-révolution induisant donc inévitablement un contenu bourgeois et réactionnaire (1).
Toute l'histoire du développement du capital -développement de la production marchande, de la force de travail en tant que marchandise ("libération" des serfs/ prolétaires modernes) s'affirme de manière concomitante grâce et autour de l'occupation/ transformation des états des modes de production précédants le mode de production capitaliste pour s'affirmer au travers de la réalité de l'Etat capitaliste mondial fer de lance et garant du bon développement du système en tant que totalité, c'est-à-dire disciplinant les capitalistes "individuels", disciplinant au nom de l'impersonnalité du rapport social la concurrence entre capitaux, groupes de capitaux, appelés notamment Etat-nation (2). Mais bien entendu, pour tous les matérialistes vulgaires et autres pseudo-marxistes la réalité de l'Etat capitaliste mondial (dont la base de l'existence est le marché mondial préexistant au mode de production capitaliste) qui n'apparaît la plupart du temps qu'au travers de l'existence concurrentielle des différents capitaux (qu'ils s'expriment en tant qu'"Etat-nation", en tant que "multi-nationales" ou trusts...) est une abstraction vide de sens, à un point tel que le concept même d'Etat capitaliste mondial se réduit au journalistique antagonisme entre "les deux blocs", or, il est une situation où l'existence pleine et entière de l'Etat capitaliste mondial éclate aux yeux ébahis de tous les gauchistes; lorsque ce dernier est contraint de s'affronter au prolétariat mondial, est contraint de s'unifier contre son ennemi historique, toutes les contradictions inter-bourgeoises passent ainsi au second plan pour voir les "ennemis d'hier" faire front, eux-aussi, classe mondiale contre classe mondiale, force contre force, Etat capitaliste mondial contre Etat prolétarien mondial!
Ainsi au concept fondamental de capital total de Marx (3) (dont la prémisse est l'universalité du mode de production capitaliste, son caractère directement mondial) correspond inévitablement le concept d'Etat capitaliste mondial (l'organisation mondiale de la bourgeoisie afin de se maintenir comme classe dominante) expression au point de vue le plus abstrait de la réalité mondiale, universelle, unifiée et subsumant totalement la planète, du mode de production capitaliste. Il est donc impossible de défendre de manière conséquente l'existence mondiale du système capitaliste sans mettre au centre de cette réalité le garant, l'organisateur de l'intérêt impersonnel et collectif de la classe capitaliste: l'Etat capitaliste mondial comme force directement agissante. D'autre part, il est clair que l'existence de l'Etat capitaliste mondial (correspondant au caractère directement collectif et anonyme de la production marchande contrairement aux modes de production qui l'ont précédés), de la défense de l'intérêt collectif et impersonnel du capital ne fait disparaître "l'anarchie de la production", ne fait évidemment pas disparaître la concurrence comme moteur essentiel du développement du capital: au contraire même, le développement du capital s'affirme toujours plus à la fois comme concentration/centralisation du capital (élimination des canards boiteux, et des capitaux insuffisamment rentables) et par la course toujours plus anarchique à la plus-value extraordinaire (dont la recherche avide est la base même de la concurrence effrénée), à la fuite en avant vers les investissements les plus "productifs" (au sens capitaliste du terme = profit). C'est cette réalité toujours plus contradictoire, toujours plus marquée qui pousse toujours plus loin la polarisation du capital en un pôle "richesse" et un pôle "misère" et la polarisation de la société autour de ses antinomies de classe: prolétariat révolutionnaire contre bourgeoisie garante du statu quo social et de la pérennité du système d'esclavage salarié.
Avant même d'arriver au mythe du "capitalisme d'Etat", il nous fallait ainsi d'abord resituer schématiquement la problématique centrale de l'Etat mondial dans la conception matérialiste dialectique, à savoir pas de développement d'un mode de production sans apparition concomitante de l'Etat correspondant à ce mode de production, cet Etat étant directement facteur actif (rejet des théories mécaniques de la superstructure -reflet- cf. Lénine...), centralisateur, organisateur collectif et impersonnel de la classe capitaliste mondiale dans son ensemble. L'expression même "capitalisme d'Etat" est donc déjà disqualifiée; il n'y a pas de "capitalisme d'Etat" parce qu'il est inconcevable -d'un point de vue marxiste- de comprendre le capitalisme (comme toutes les autres sociétés de classe) sans Etat! L'Etat capitaliste a toujours été (et est toujours) au centre du développement du système capitaliste. L'expression même de "capitalisme d'Etat" est au "mieux" une tautologie et nous verrons qu'au "pire" elle induit une bonne partie du programme de la contre-révolution.
Il devient ainsi totalement dérisoire de se poser la question (ce qui revient à la bêtise tautologique de "l'oeuf et la poule") si c'est d'abord "l'Etat" (réduit chez les plus bêtes au "gouvernement") qui garantit toutes ces multiples formes juridiques d'appropriations privatives ou ces dernières qui, en fonction du rapport de force inter-bourgeois, "dirigent" la politique des différents "Etats-nations" dans l'intérêt de tel ou tel type de concentration. Ce que nous savons, de toute façon de notre point de vue de classe, c'est que c'est: "au plus fort la poche"! C'est que la valeur se déplace vers les pôles de concentration de valeur pour se valoriser encore plus. Et ce, au-delà (et parfois contre) toutes les formes juridiques formelles et leurs couverts idéologiques. Le capitalisme a donc toujours utilisé de multiples formes juridiques, prétextes aux multiples justifications idéologiques sur la nature pseudo-différente des états capitalistes nationaux comme paravent, comme couverture à l'essence unique du système: l'appropriation privative, la production de sur-valeur, l'exploitation de l'homme par l'homme. Cautionner d'une façon ou d'une autre le fait que certaines de ces formes juridiques seraient "moins capitalistes", plus "socialistes", plus "progressives", "différentes", "intermédiaires", "demi-demi"... en revient inévitablement aux bêtises contre-révolutionnaires du stalinisme et du trotskisme justifiant la nature "socialiste" de l'économie soviétique (et maintenant des 2/3 de l'humanité, bloc de l'Est, Chine, Nicaragua...) sous prétexte que la propriété (bien entendu privative) est "collective" et "étatisée" (4). La moindre concession sur cette question, et c'est directement l'ensemble des positions qui passent (qu'on le veuille ou non) dans le camp de la contre-révolution car s'il y a des formes juridiques "moins privées", il faut les défendre... et nous voilà directement en pleine guerre impérialiste avec comme toujours un camp plus "progressiste" ou moins "fasciste", à défendre... Nous n'y reviendrons pas ici (5).
Essentiellement donc l'utilisation de ces différentes formes juridiques sous lesquelles un même capitalisme se développe ne sert qu'à essayer de nous faire croire qu'il existerait un autre monde "moins capitaliste" ou, pour les plus cons, le "paradis socialiste". Et de là on en vient à l'opposition on ne peut plus éculée entre le "capitalisme de libre échange" et celui "d'Etat". Or, quelle est la réelle signification marxiste du "libre échange" et ce de manière invariante sous le capitalisme? Il s'agit de la liberté (dont ses corollaires sont l'égalité et la citoyenneté) de vendre et d'acheter des marchandises à leur valeur d'échange (et cela se réalise comme chacun sait, non pas pour chaque marchandise, mais au travers d'un processus social et mondial qui fait que globalement les marchandises s'échangent à leur valeur). L'échange marchand est ainsi aussi libre à Washington qu'à Moscou... il suffit d'avoir des billets de banques ou mieux encore, une carte de crédit!! Avec en prime pour les pays prétendument socialistes le marché noir qui fait presque de chaque citoyen une petite banque ambulante... "Des devises, camarades?" Marx avait déjà précisé:
"Le capital suppose donc le travail salarié, le travail salarié suppose le capital. Ils sont la condition l'un de l'autre, ils se créent mutuellement."Et Bordiga de commenter:(Travail salarié et capital)
"Ou l'argent ou le socialisme (...) Il n'y a pas encore socialisme lorsque l'on attribue une valeur au travail; et il en est de même quand à toute autre marchandise est attribuée une valeur d'échange."Le Dieu Argent devant lequel tous les capitalistes du monde s'applatissent, quelle que soit leur idéologie, est bien l'illustration éclatante de l'unicité du système d'échange marchand, de l'universalité de son caractère libre échangiste. A plus forte raison en période de crise (qui elle aussi ne peut être que mondiale) où tous les capitalistes "privés comme planificateurs" sont déboussolés et s'acharnent à prendre les mêmes mesures partout provoquant les mêmes résultats: l'aggravation de la crise mondiale. Le mythe du "monde libre" est donc directement complémentaire à celui du "monde socialiste" (et est complété comme nous l'avons vu dans la note 1, par celui du "tiers-monde"). Ils sont symétriques et ne servent en dernière instance que de justification à la préparation de la troisième boucherie impérialiste mondiale. Encore une fois, le système capitaliste mondial est un et du point de vue ouvrier: il est "indivisible"!(Commentaires des manuscrits de 1844 - in La passion du communisme - éd. Spartacus)
Cette grave trahison par la sociale-démocratie (et ce non pas en 1914! mais dès sa création!) de la conception marxiste de la nécessaire destruction de fond en comble du capitalisme se retrouve évidemment dans les débats sur le "capitalisme d'Etat" qui ont agité le parti bolchévique presque immédiatement après que celui-ci ait pris le pouvoir en 1917. L'insurrection prolétarienne de '17 dirigée par la fraction révolutionnaire au sein des bolchéviques (Lénine, Trotsky), n'ayant pas réellement détruit l'Etat bourgeois, ni pris les mesures élémentaires pour s'inscrire dans cette perspective, les nécessités de la défense du capital et de l'"Etat-nation" ont ainsi presque immédiatement prédominé dans la politique bolchévique. Cela s'est traduit dans la succession des mesures capitalistes prises pour développer l'accumulation du capital, dans la question de la paix de Brest-Litovsk et de la guerre révolutionnaire, dans la répression des fractions communistes de gauche, d'abord bolchéviques de gauche, socialistes-révolutionnaires de gauche... jusqu'au massacre de Cronstadt en 1921 (6) clôturant définitivement toute possibilité de renverser le rapport de force mondial en faveur de la révolution et ouvrant donc la période de contre-révolution mondiale sous ses formes staliniennes, fascistes et anti-fascistes. (Cette position était déjà défendue à l'époque par le KAPD et le groupe ouvrier de Miasnikov (7)).
Donc, dès la prise du pouvoir par les bolchéviques "les vieilles" conceptions sociale-démocrates du développement du capital et du passage au "socialisme" prédominent largement, se matérialisant notamment au travers des multiples débats autour du "capitalisme d'Etat". Dès 1918, la fraction des communistes de gauche (Boukharine, Radek, Ouritsky, Ossinsky, Kollontaï, Préobrajensky, Piatakov... regroupés autour de la revue "Le Communiste") opposée au traité de Brest-Litovsk, s'attaque également à l'évidence de la continuité capitaliste en Russie sous le vocable de "capitalisme d'Etat" (introduction du système Taylor, copie du capitalisme "allemand", etc.):
"Cependant, toutes ces nouvelles organisations apparaissent de façon surprenante, justement au moment de la signature du traité de paix, avec ce recul devant le capital mondial qui était accepté comme base de la paix imposée, avec ces grandes concessions à l'impérialisme étranger qui émanent de là. La guerre a eu lieu non seulement pour la conquête du pays, du territoire; mais aussi pour amener économiquement ce territoire sous les tentacules du capital."Et de manière concomitante à cette opposition prolétarienne "interne" aux bolchéviques se développait celle dirigée par les socialistes-révolutionnaires de gauche, qui après des années de falsifications stalino-démocratiques apparaissent au regard du peu de documents dont nous disposons, comme étant également une expression indéniable de la défense des intérêts prolétariens et de la révolution mondiale.(N. Osinski - "Sur la construction du socialisme" cité dans "Traité de Brest-Litovsk 1918, coup d'arrêt à la révolution" - G. Sabatier - éd. Spartacus)
"La révolution ouvrière russe ne peut pas, 'pour se conserver' s'écarter de la voie révolutionnaire internationale, en évitant continuellement le combat, en battant en retraite devant l'offensive du capital international, en faisant des concessions au capital national."Mais, la discipline, le fétichisme du parti formel étant très rapidement venu à bout de la fraction de gauche des bolchéviques, et les S-R de gauche étant aussi faibles et confus dans leur compréhension de la globalité du processus révolutionnaire que dans leur pratique "semi-putchiste" (assassinat de l'ambassadeur d'Allemagne pour déclencher la guerre révolutionnaire!?), ces expressions de la résistance prolétarienne sont très écrasées laissant la seule place à la question de la meilleure façon de gérer le capital en Russie. Se développe alors au sein du Parti Bolchévique une succession de débats et de mesures, "communisme de guerre", "militarisation du travail", "nouvelle politique économique" (la fameuse NEP)... qui ne font en fait que matérialiser les différentes tendances pour gérer au mieux le développement du capitalisme en Russie, appelée de plus en plus "construction du socialisme en un seul pays". En ce sens, Lénine par exemple, se réfère au capitalisme d'Etat tantôt comme à une étape dans le chemin qui mène la "Russie au socialisme", tantôt comme à une politique ou à des méthodes auxquelles l'Etat soviétique doit avoir recours dans la défense du "capital national". Il est indéniable que Lénine a largement oscillé sur ces questions et qu'à la fin de sa vie il développait pour le moins des positions contradictoires sur le "capitalisme d'Etat", tout comme sur la nature même de l'Etat bourgeois en Russie (9). On connaît également les nombreuses et contradictoires contributions de Boukharine sur cette question, passant de l'extrême gauche du parti à son extrême droite. Dans un de ses ouvrages les plus intéressant il note:("Nos alliés dans le camp de nos adversaires" article S-R de gauche, in "La Russie socialiste") (8)
"Le capitalisme d'Etat est la rationalisation du processus de production, sur la base de rapports sociaux antagonistes, sous la domination du capital qui trouve son expression dans la dictature de la bourgeoisie. Puisque le capitalisme d'Etat est une fusion de l'Etat bourgeois et des trusts capitalistes, il est évident qu'on ne peut parler de 'capitalisme d'Etat' sous la dictature du prolétariat, qui exclut en principe toute possibilité de ce genre."Ce contre quoi Lénine défendait la position sociale-démocrate classique:(N. Boukharine - "Economique de la période de transition" pg. 143 - éd. EDI - 1919-20)
"Déjà à ce moment, j'ai montré que le capitalisme d'Etat serait supérieur au régime économique existant actuellement chez nous."Ou bien pire encore dans son exécrable texte "Sur l'infantilisme de gauche et les idées petites-bourgeoises":(Lénine - "De la coopération" - Oeuvres tome 33 pg. 480)
"Or, ils n'ont pas songé que le capitalisme d'Etat serait un pas en avant par rapport à l'état actuel des choses dans notre République des soviets, si, dans six mois, par exemple, nous avions instauré chez nous le capitalisme d'Etat, ce serait un immense succès et la plus sûre garantie qu'un an plus tard, dans notre pays, le socialisme serait définitivement assis et invincible."Comme on le voit, la conception centrale de Lénine (et que dire de l'infâme conception de Trotsky sur la militarisation du travail. Cf. "Les questions d'organisation du travail" in "Terrorisme et Communisme" - éd. Promethée - pg. 137) est celle de la continuité capitaliste sur base du modèle allemand du "capitalisme d'Etat" conçu comme une étape, comme un intermédiaire indispensable entre un capitalisme "pur", idéel et un "socialisme" pour le moins utopique et à venir... Les bases ainsi jetées, l'achèvement complet de la perspective contre-révolutionnaire pouvait pleinement se développer avec Staline, Boukharine, Zinoviev, Varga... jusqu'au "Manuel d'économie politique" théorisant ouvertement le maintien de la production marchande et de la "loi de la valeur" en système soviétique! La boucle était bouclée. De leur propre aveu les rapports sociaux étaient bel et bien strictement et exclusivement capitalistes, il ne s'agissait plus que de les recouvrir du vernis du "socialisme réel".(Lénine 1918 - Oeuvres tome 27 pg. 349) (Nous soulignons ici déjà l'apologie non seulement du capital mais de la "patrie socialiste"! NDLR)
"La loi de la valeur, entre autre, s'applique-t-elle ou non à l'économie russe? Si oui, tout mécanisme économique fonctionnant selon la loi de la valeur n'est donc pas pur capitalisme? A la première question, Staline répond, oui, chez nous la loi de la valeur est en vigueur, même si ce n'est pas partout. A la seconde: non, il peut exister une économie qui, tout en n'étant pas capitaliste respecte la loi de la valeur." (!) C'est ainsi que résumait Bordiga (in Dialogue avec Staline - 1953) les aberrations défendues par les grands défenseurs du "marxisme-léninisme et de l'URSS", il en existe toujours...! Mais il existe encore d'autres variantes à ces conneries bourgeoises comme par exemple l'assimilation de la période de transition (en tant que système mondial!) au "capitalisme d'Etat" ou encore les délires de P. Mattick sur la possibilité d'un développement du "nouveau mode de production", un "pont" entre le capitalisme et le communisme, où existerait la loi de la valeur (ce qui en fait est la reprise de la thèse de Staline) mais qui serait une "nouveauté" non prévue par l'analyse critique marxiste; sans compter la variable classique du trotskisme plus ou moins radicalisée à la sauce Mandel (10). Mais toutes ces variantes en reviennent fondamentalement à la même: essayer de justifier le caractère non-mondial du système d'esclavage salarié et par là, de le défendre contre l'inévitable révolution communiste mondiale.
1/ que le capitalisme se développe directement en tant que rapport social mondial (avec comme corollaire l'existence du marché mondial);
2/ que le capitalisme dans son mouvement toujours plus poussé d'accumulation, de concentration, de centralisation d'organisation s'est toujours (et toujours plus fortement) appuyé sur la force centralisée qu'est l'Etat et cela à la fois dans sa lutte contre le prolétariat et dans ses luttes concurrentielles et inter-impérialistes;
3/ que cet Etat est, face au prolétariat mondial, l'Etat capitaliste mondial comme centralisation internationale de la force contre-révolutionnaire, de la force de maintien du système d'esclavage salarié (terreur et terrorisme de l'Etat).
Ces aspects fondamentaux de notre programme étaient déjà défendus par Marx et Engels lorsque ce dernier écrivait:
"Le mode de production capitaliste, qui a commencé par évincer des ouvriers, évince maintenant les capitalistes et, tout comme les ouvriers, il les relègue dans la population superflue, sinon dès l'abord dans l'armée industrielle de réserve, mais ni la transformation en sociétés par actions, ni la transformation en propriété d'Etat ne supprime la qualité de capital des forces productives. Pour les sociétés par actions, cela est évident. Et l'État moderne n'est à son tour que l'organisation que la société bourgeoise se donne pour maintenir les conditions extérieures générales du mode de production capitaliste contre les empiétements venant des ouvriers comme des capitalistes isolés. L'Etat moderne, quelle que soit la forme, est une machine essentiellement capitaliste: l'Etat des capitalistes, le capitalisme collectif en idée. Plus il fait passer de forces productives dans sa propriété, et plus il devient capitaliste collectif en fait, plus il exploite de citoyens. Les ouvriers restent des salariés, des prolétaires. Le rapport capitaliste n'est pas supprimé, il est au contraire poussé à son comble."(Engels - L'Anti-Düring - pg. 315 - éd. sociale) (Souligné par nous NdlR)
2. Nous avons développé notamment dans notre texte "Contre les mythes qui sous-tendent la libération nationale (Le Communiste No.20), la conception fondamentale de la constitution des "Etats-nations" sur base des nécessités de l'accumulation capitaliste et non de l'inverse "développement du capital sur base de l'idée de nation" qui est la base de tout nationalisme. Pour notre part, "l'Etat-nation" n'est qu'une des formes (expressions) de la concentration des capitaux, qui, après coup se donne une base idéologique dans l'idée et la pratique du nationalisme, du pays, du continentalisme, etc. Il suffit pour se convaincre de cette évidence de voir quel est "l'Etat-nation" au monde qui correspond effectivement à la définition de la nation: la communauté de langue, d'histoire, de culture... C'est simple, il n'y en a jamais eu, il n'y en a pas, il n'y en aura jamais. C'est le parfait mythe contre-révolutionnaire sous-tendant la position tout aussi contre-révolutionnaire du "droit des peuples à l'auto-détermination", "du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes", de la "libération nationale"...
3. Il est intéressant de souligner ici que dans le plan du Capital de 1857 Marx prévoyait un chapitre IV "Le livre de l'Etat" et un chapitre VI "Le livre du marché mondial et des crises". Sur cette question, cf. "La genèse du Capital" chez K. Marx" - R. Rosdolsky - éd. Maspero.
4. Pour plus de développement sur cette question nous renvoyons le lecteur à notre texte: "Trotskysme: produit et agent de la contre-révolution" dans Le Communiste No.8.
5. Une fois que nous avons bien développé l'aspect essentiellement identique des différentes formes juridiques sous lesquelles se développe le rapport social capitaliste, il est également à remarquer qu'à un tout autre niveau d'analyse, il existe aussi réellement des "différences" entre ces formes toutes aussi capitalistes les unes que les autres. Et c'est justement là, une des difficultés pour comprendre en quoi des formes phénoménales "différentes", n'étant en fait que des expressions d'un même contenu capitaliste (comme le pôle richesse est aussi capitaliste que le pôle misère) peuvent exprimer certaines "différences" dans la manière (et non dans le contenu capitaliste) dont se concentre et se centralise le capital. Juste pour souligner cette réalité nous citerons le fait évident que la plus forte concentration/centralisation de capital s'effectuant aux USA, la force de cette centralisation permet des rotations accélérées des capitaux. Dans des pôles de concentration de capitaux moins "forts", moins concentrés, moins centralisés des formes juridiques plus lourdes, plus archaïques, même si présentées sous le couvert de la "planification", de l'économie "dirigée", "nationalisée", "étatisée" peuvent être une entrave supplémentaire à la valorisation de ce type de capitaux. Cela étant dit, il est fondamental de réaffirmer une fois de plus que si des formes de propriété juridique différentes ont existé et existent, il s'agit avant tout, du point de vue de notre classe, de formes phénoménologiques camouflant l'essence commune de toutes: les rapports mondiaux de production capitaliste.
6. Nous avons déjà très largement développé d'une part la phase révolutionnaire de l'insurrection d'Octobre dans notre texte: "Quelques leçons d'Octobre 1917" dans Le Communiste No.10/11 et d'autre part la phase contre-révolutionnaire s'amorçant à la prise du pouvoir, dans un travail d'ensemble publié pour l'instant en espagnol: "Russie: contre-révolution et développement du capitalisme" dans notre revue centrale Comunismo No.15/16 et 17. De cette vaste étude ont déjà été publiés:
7. Sur ces questions nous renvoyons le lecteur à notre texte "Le KAPD dans l'action révolutionnaire" dans Le Communiste No.7.
8. Voir à ce sujet: "Les socialistes-révolutionnaires de gauche dans la révolution Russe" une lutte méconnue reproduction en fac-similé de deux brochures publiées par les S-R de gauche en 1918 - éd. Spartacus No.122B.
9. Pour une étude détaillée de ces questions nous pouvons renvoyer le lecteur aux ouvrages de Ch. Bettelheim: "Les luttes de classes en URSS" trois tomes, qui s'ils développent l'analyse mao-stalinienne du "capitalisme d'Etat" n'en contiennent pas moins de très nombreuses informations intéressantes. Citons également dans le même esprit, le livre de B. Chavance: "Le capital socialiste" - éd. Sycomore, qui donne une bonne analyse critique de l'histoire économique de l'URSS de 1917 à 1934.
10. Nous avons volontairement passé sous silence la variante du "capitalisme d'Etat" assimilée au capitalisme dans son "troisième âge", dans sa période de "décadence", de "sénilité", dans sa "phase impérialiste" etc, ensemble de notions recoupant l'aberrante césure du capitalisme en deux périodes, l'une de montée "ascendante" et l'autre de "déclin", impliquant de nombreuses aberrations politiques. Nous reviendrons prochainement sur ces questions dans le cadre plus adéquat de la critique des différentes visions décadentistes.