Ces caractéristiques sont celles de la période 1945-1965 qui a succédé à la dite "Deuxième Guerre Mondiale". L'illusion d'un monde sans contradictions était d'autant plus forte que la Paix des Tombes, consécutive à la guerre était parvenue à imposer le silence au prolétariat.
Le discours dominant est alors celui d'une bourgeoisie consciente de la puissance qu'elle trouve dans l'exploitation du prolétariat. Ce sont des années d'or pour les capitalistes qui, toutes fractions confondues, font chanter aux prolétaires les bienfaits du "développement" et de la production "taylorisée": l'apparition de l'aspirateur et de la machine à laver sont présentés comme une révolution qui doit libérer la femme des travaux ménagers et la réduction du temps de travail (accompagnée d'une hausse de l'intensité du travail!) est censée manifester les premiers pas vers une "société des loisirs"! Convaincus du développement éternel de leur triste société, les bourgeois n'ont aucun doute quant à leur avenir. Les patrons, les cadres et autres petits chefs de l'Etat n'ont de cesse de vanter les mérites "historiques" de la camelote dont ils font commerce, et cette assurance quant au succès de leur vente se double d'une certitude du devenir éternel de cette généreuse société qui leur permet si docilement de développer leurs capitaux.
Mais tout cela n'a qu'un temps. Les utopies capitalistes viennent bien vite se heurter à la réalité des temps de crise. Les mêmes limites historiques du Capital se manifestent à nouveau. Les pôles positifs de "développement", de "richesse", de "paix" ne parviennent soudain plus à occulter leurs indissociables contraires: les pôles négatifs que constituent le "sous-développement", la "pauvreté", la "guerre". C'est un moment très pénible pour la bourgeoisie qui voit s'effondrer progressivement le mythe dont elle se nourrissait: celui d'un développement éternel et sans à-coups de ses richesses.
Le Capital rentre donc progressivement en crise. Les capitalistes s'affrontent de plus en plus violemment pour le contrôle des parts d'un marché chaque fois plus secoué. Cela se traduit comme aujourd'hui, par un phénomène de fuite en avant dans tous les domaines, fuite en avant justifiée par la nécessité de dégager par n'importe quel moyen la plus petite poche d'air que représente un espace de valorisation. Les capitaux cherchent à se nourrir de survaleur, mais comme ils sont en surproduction, cela devient de plus en plus difficile. Des sommes immenses sont consacrées à la publicité, la spéculation financière s'opère sur une échelle chaque fois plus grande, on investit à haut risque et dans tous les domaines où il est imaginable de développer un capital: du trafic d'organes humains aux armes biologiques (cf. le texte à propos du sida, dans cette revue) en passant par la nourriture de luxe pour animaux domestiques.
Cette fuite en avant ne fait que renforcer plus encore le chaos régnant sur le marché mondial en crise. Les capitalistes s'associent pour être plus forts dans la guerre qui les oppose aux autres capitalistes... qui eux-mêmes se regroupent pour les affronter. Les guerres se font plus fréquentes, plus dures, plus généralisées.
On aura reconnu la situation qui prévaut aujourd'hui.
Tout cela se traduit par des multiples changements dans les formes par lesquelles le Capital s'organise en Etat: on restructure au Nord, au Sud, à l'Est et à l'Ouest, et on présente ces changements superficiels et formels comme des grands moments de remise en question du monde. Les "Plans Printemps-Hiver" en Amérique du Sud, les "Perestroïka", "Ouvertures" et "Chutes de Mur" à l'Est, les "Restructurations" en Occident, les "Conférences Nationales Démocratiques" en Afrique, les nouvelles républiques nationales, la CEE ou le grand marché Mexique-USA-Canada, les Xièmes plans gouvernementaux d'austérité, les chutes de "dictature" et autres grands spectacles de la réconciliation nationale entre anciens guérilleros et tortionnaires (cf. le "Nous Soulignons" de cette revue) composent autant de décors qui viennent camoufler aux yeux crédules, l'aggravation de l'exploitation du prolétariat opérée par une bourgeoisie prise à la gorge par la crise. On redonne une bonne couche de peinture au Vieux Monde moribond, on ravale la façade des gouvernements discrédités, et si cela ne suffit pas, on change encore la tapisserie et le papier peint: de nouveaux syndicats se créent, on prétend lutter contre la corruption, on dénonce l'un ou l'autre responsable du blanchiment de l'argent pour redonner une image plus propre des traficotages capitalistes permanents, etc. Ces restructurations capitalistes sont soutenues par de multiples campagnes idéologiques qui les assimilent à de généreux efforts des bourgeois pour se "remettre en question". Le grand spectacle du nettoyage de printemps peut commencer: "Glasnost" en Russie, "Transparence" à l'Ouest, "Mane Pulite" en Italie, "Lutte contre la drogue" en Amérique du Sud, "Lutte contre l'Argent Sale" en Suisse, etc. Le capital international prétend faire peau neuve et encourage le prolétariat à faire de même: "finissons-en avec cette très vieille notion de lutte de classes; le communisme est mort, ne parlons donc plus d'exploitation, de prolétaires,..."
Toutes ces "restructurations" politiques, tous ces petits événements dans la façon de gérer l'exploitation sont présentés comme de grands bouleversements, comme de véritables "révolutions" pour le devenir de tous. Et par ces programmes, la bourgeoisie parvient effectivement à renforcer l'austérité, à la faire accepter par le prolétariat et à reporter momentanément une crise dont la généralisation et la profondeur se font chaque fois plus criantes.
Mais derrière tous ces ravalements de façades, derrière toutes ces modifications formelles, et face à la multiplication des conflits guerriers intercapitalistes, face à l'impossibilité pour la bourgeoisie de définir l'avenir autrement qu'en termes d'une crise chaque fois plus aiguë, la bourgeoisie est malgré tout incapable de cacher l'horrible doute qu'elle sent naître quant à la pérennité de son système: le Capital doute soudain de son devenir.
Les patrons, les syndicalistes, les gouvernants, les cadres, les idéologues, les scientifiques, les marchands bref, l'ensemble des gestionnaires capitalistes, sont pris d'une terrible hésitation quant à l'avenir. Incapables de saisir le devenir du monde au travers du dépassement du capitalisme, leur point de vue borné vient buter systématiquement sur les chiffres de leurs propres indicateurs qui, tous, annoncent une catastrophe économique généralisée, une impossibilité à dépasser la crise, un point de non-retour pour ces chères années d'expansion aujourd'hui disparues (cf. "La Catastrophe capitaliste", dans cette revue).
Le schéma du doute devient alors le schéma dominant dans la société. Le capitaliste est perplexe et doute de tout. De l'avenir, bien sûr, mais aussi de ses alliés, des capacités de ceux qu'il a sous ses ordres, des possibilités d'investir, de ses propres programmes de gestion, des bienfaits de la libre entreprise tout autant que de ceux du protectionnisme,... le doute s'installe dans tous les secteurs de la société. Les cadres regardent leurs collègues tomber les uns après les autres sous les coups de restructurations de sociétés et font dépression sur dépression face à l'impossibilité dans laquelle ils se trouvent d'assumer un bilan positif de la gestion capitaliste dont on leur a confié la responsabilité. Des cliniques spécialisées dans le "regonflage" de cadres ont récemment été mises sur pied en Suisse! Aux certitudes des années d'après-guerre et de reconstruction succèdent maintenant des années noires où le scepticisme règne en maître. La religion capitaliste se transforme en un grand point d'interrogation!
Comment pourrait-il en être autrement, aujourd'hui? Dans la pratique, les ouvriers voient chaque jour leur salaire baisser quant ils ne sont pas purement et simplement mis au chômage. Jetés à la rue, niés dans toute leur humanité, détruits par l'individualisme ambiant et le chacun pour soi, atomisés par la concurrence, dépossédés de toute perspective par l'écran idéologique que la bourgeoisie a réussi à composer entre la triste réalité de la vie immédiate en suspens et la perspective d'abolition des classes, on comprend qu'ils perdent totalement la conscience de former une classe sociale, une communauté d'intérêts.
Pourtant, s'il est bien une chose que redoute la bourgeoisie, dans une période où le Capital n'a aussi ouvertement rien d'autre à offrir aux ouvriers que la misère et la guerre, c'est précisément le fait de voir les prolétaires reconnaître la communauté d'intérêts qui les relie par delà les frontières et se constituer en classe, s'organiser en parti.
C'est en ce sens que le Capital, parallèlement à l'incapacité d'offrir une perspective enthousiasmante au prolétariat, a tout intérêt à dénoncer et à écraser toute tentation de notre classe à se reconnaître et à s'organiser autour de sa perspective: le communisme. A ce niveau, parallèlement à ses propres angoisses face à l'avenir, la bourgeoisie cherche à faire douter le prolétariat de son projet, de son programme, de ses buts. Il s'agit de communiquer son propre doute quant au futur bloqué, au doute du prolétariat pour toute alternative propre.
De là provient l'acharnement de la bourgeoisie à clamer partout la "mort du communisme" en identifiant l'esclavage salarié organisé pendant plus de 70 années en Russie et ailleurs sous le drapeau du socialisme, à l'abolition du salariat que revendique toute l'histoire du communisme. Quoi de plus intéressant en ce sens, que de présenter ce système particulier de gestion capitaliste appelé "socialiste" et inutilisable aujourd'hui pour les gestionnaires locaux, comme un échec... du prolétariat! Et c'est ainsi que le capitalisme peint en rouge (les pays soi-disant "communistes") est assimilé, dans sa chute, au communisme!
Pour éloigner toujours plus le prolétariat de son projet, il faut absolument le faire douter qu'il existe en quoi que ce soit une alternative possible à cette société de mort. Dans le cadre de l'effondrement des obsolètes méthodes de gestion capitalistes propres aux pays dits "socialistes", les médias du monde entier nous ont chanté en choeur la mort du communisme. La bourgeoisie s'est retrouvée à l'unisson derrière cette chanson, toutes fractions confondues. Les autocollants présentant les photos de Marx et Engels barrés du mot d'ordre "Le libéralisme a vaincu" s'accompagnaient de l'auto-critique de la Social-Démocratie internationale (des mitterandistes aux staliniens eux-mêmes) quant à la fausse route entreprise sous la bannière du "communisme" (comme si toute cette racaille réformiste avait jamais rien eut à voir avec le projet de destruction de l'Etat capitaliste).
Unis dans un même refrain, des "reaganiens" aux vieux soixante-huitards en passant par les anciens indéboulonnables "soviétiques", tout le monde s'est retrouvé ensemble dans une grande fraternité bourgeoise pour dire que oui, effectivement, maintenant le communisme était définitivement enterré.
Et vraiment, jamais dans l'histoire, il ne s'est sans doute trouvé un aussi grand consensus démocratique pour imposer cette vision. Les plus radicaux de ces militants de l'extrême-gauche bourgeoise ont fait amende honorable: l'allemand Cohn-Bendit donne maintenant des cours de civisme aux policiers de Francfort, les guérilleros "guévaristes" du FMLN au Salvador demandent leur intégration en masse dans la police nationale, le grand prêtre français du maoïsme Alain Geismar et le "terroriste tiers-mondiste" Régis Debray conseillent gentiment le Parti Socialiste de Mitterrand en France, l'ancien agitateur "yippie" américain Jerry Rubin donne des cours de criminologie aux "yuppies" de Los Angeles, les tupamaros uruguayens revendiquent une présence au gouvernement dans le cadre d'un Front élargi, le pourfendeur tiers-mondiste Jean Ziegler qui avait écrit une dénonciation de la Suisse impérialiste sort ces jours-ci un livre intitulé "Le bonheur d'être suisse" (sic!) dans lequel il autocritique son "dogmatisme aveuglant et sa critique radicale"... etc. etc.
Il est évidemment heureux pour les communistes de voir ces "faux-amis" se démarquer ouvertement du communisme: cela a l'avantage de rendre plus clairs les contours qui délimitent le camps de la démocratie et celui du communisme. Mais il faut bien admettre qu'aujourd'hui, les constats d'échec dont ces anciens partisans de l'extrême-gauche bourgeoise font la publicité en assimilant leur travail passé de réforme radicale à la militance classiste, ont essentiellement eu pour effet de renforcer un peu plus le découragement généralisé quant à la militance communiste.
Et c'est jusqu'aux quelques organisations classistes qui tentaient de maintenir le fil rouge reliant l'ancienne génération de révolutionnaires à celle qui suivra, qui ont elles aussi subi le poids des assauts répétés de toute cette idéologie défaitiste pourrie, structurée autour de cette nécessité d'une pseudo-remise en question. Il suffit de voir le nombre de brochures "militantes" recommandant la remise en question, le doute et la modernité comme axe "par rapport au communisme démodé" pour avoir une idée des ravages que cette idéologie du doute de tout avec tout a eu comme effet au sein même des militants organisés.
Nous sommes également confrontés à cette marque de la période actuelle. Ainsi, quand dans notre presse, nous relatons les luttes actuelles de notre classe, il arrive que des proches contacts de notre groupe eux-mêmes expriment ce doute. "Y a-t-il eu une insurrection prolétarienne en Irak? Qu'est-ce qui nous prouve que vos sources et vos dires sont exacts? D'où tenez-vous ces informations?..." Ces camarades, soumis aux effets de la paix sociale, se réfèrent plus à la désinformation bourgeoise qu'aux matériaux et témoignages directs rapportés par les camarades de la région. Le problème s'accentue encore lorsque, aveuglés par la misère du quotidien, ce scepticisme dominant casse la solidarité et l'action commune autour de ces luttes (cf. notre texte à propos de l'affiche internationale).
Aujourd'hui plus qu'hier, revendiquons le communisme en nous affrontant à l'ensemble de la bourgeoisie dans ces multiples variantes démocratiques qu'elles soient social-démocrates, nationalistes, staliniennes, maoïstes, fascistes ou autres, en mettant en avant le contenu original du communisme: la négation de tout l'être capitaliste!
Contre l'Economie, la Politique et la Religion, contre l'Art, la Science et le Progrès, contre la Famille, le Travail et toutes les Patries, contre le Salariat, crions plus fort que jamais: vive le Communisme, vive la Révolution Sociale Mondiale, vive l'organisation communiste internationale du prolétariat!
"Quelle apathie, quel affaissement, quelle métamorphose! Avec mes idées de révolution aussi ardentes que jadis, j'avais l'air d'un revenant de l'autre monde, d'un fantôme des temps passés. J'y ai passé (à Paris - NDR) quelques jours pleins de douleurs et de colère. Mais je n'ai pas perdu pour cela l'espérance. Il faudra galvaniser ces cadavres, s'ils ne veulent pas marcher vivants."Dix ans plus tard, c'était la Commune de Paris!(Blanqui, 1859 - Cité par M. Dommanget)
Aujourd'hui, dans une situation similaire à celle à laquelle se réfère cette citation de Blanqui, dans une situation où on nous regarde comme "les fantômes d'un temps passé", comme les "dinosaures d'une époque révolue", nous affirmons clairement et à contre courant du scepticisme dominant, de la fausse "remise en question", ne pas douter de l'effondrement inéluctable du Capital!
Face à tous ceux qui nous promettent de diverses manières la survie de cette société, nous ne doutons pas que comme n'importe quel organisme vivant, social, historique, comme n'importe quelle société préalable, le Capital est un être contenant ses propres contradictions mortelles, et dont le dépassement ne dépend en rien d'une nouvelle religion, mais de la négation vivante portée en son propre sein par la classe d'hommes qu'il condamne à travailler pour exister.
Nous ne "croyons" pas au communisme, nous le saisissons pratiquement dans le mouvement qui se déroule sous nos yeux, dans le réel mouvement d'abolition de l'ordre établi, dont les balbutiements se sont récemment exprimés dans les luttes de nos frères de classe en Irak ou, de façon plus limitée, à Los Angeles, ainsi que dans les quelques initiatives -même modestes- pour transformer la communauté objective d'intérêts du prolétariat en une active communauté de lutte internationale, organisée et centralisée.
Non, nous ne doutons pas que cette société basée sur l'égoïsme, l'individualisme et le repli sur soi verra prochainement renaître contre elle, la solidarité dans le cadre de la lutte qu'accomplit notre classe pour se libérer de ses chaînes.
LaCatastropheCapitaliste |
"Le mouvement ouvrier n'a pas à attendre une catastrophe finale, mais beaucoup de catastrophes, des catastrophes politiques -comme les guerres- et économiques -comme les crises qui se déclenchent périodiquement, tantôt régulièrement, tantôt irrégulièrement, mais qui dans l'ensemble, avec l'extension croissante du capitalisme, deviennent de plus en plus dévastatrices. Cela ne cessera de provoquer l'écroulement des illusions et des tendances du prolétariat à la tranquillité, et l'éclatement de luttes de classe de plus en plus dures et de plus en plus profondes. Cela apparaît comme une contradiction que la crise actuelle -plus profonde et plus dévastatrice qu'aucune auparavant- ne laisse rien entrevoir de l'éveil d'une révolution prolétarienne. Mais l'élimination des vieilles illusions est sa première grande tâche... Des luttes sérieuses ne peuvent pas ne pas venir. La crise présente peut bien se résorber, de nouvelles crises viendront et de nouvelles luttes. Dans ces luttes, la classe ouvrière développera sa force de combat, reconnaîtra ses objectifs, se formera, se rendra autonome et apprendra à prendre elle-même en main ses propres destinées, c'est-à-dire la production sociale. C'est dans ce processus que s'accomplit le trépas du capitalisme. L'émancipation du prolétariat par lui-même est l'écroulement du capitalisme."Anton Pannekoek, 1934.
Chaque large cycle d'expansion économique doit nécessairement se clôturer par une dépression. Au développement des forces productives correspond l'impérieuse nécessité de leur destruction, toute accumulation de richesses produit une misère proportionnelle, et la concentration, la centralisation du capital entraîne inéluctablement un rétrécissement croissant des possibilités lucratives d'investissements.
Contrairement aux apologues du système, contrairement à tous ceux qui, fascinés par le cycle d'expansion, prétendent, chaque fois que s'affirme un cycle d'expansion, qu'il n'y aura plus jamais de crise, nous, communistes, nous avons toujours insisté sur les limites intrinsèques du capital ainsi que sur l'unité indissociable qui existe entre accumulation du capital et accumulation de la misère, entre développement des forces productives et développement catastrophique de la société, entre "richesses de la nation" et guerre impérialiste.
A contre courant de toutes les versions du parti de l'ordre et en opposition totale à la social-démocratie, à contre courant du fatalisme et des illusions dominantes, toute proclamation d'un "nouvel ordre mondial" épuré de ses contradictions ne peut que nous faire sourire. Nous remettons invariablement en évidence l'essence catastrophique de ce système. Nous clamons haut et fort (et malgré notre isolement) que les catastrophes à venir seront bien plus destructrices encore, que le système n'est qu'une baudruche qui enfle pour mieux éclater, que modérer aujourd'hui les contradictions du capital revient uniquement à postposer et exacerber son inévitable explosion.
La validité de la théorie communiste est une nouvelle fois confirmée par l'actualité: la catastrophe économique, sociale, politique,... est mondiale; partout, la classe ouvrière subit plus de misère, plus de chômage, plus de guerre,... Le monde capitaliste est de plus en plus incapable d'occulter sa putride réalité.
Notre intention n'est pas, dans cet article, d'accumuler les chiffres catastrophiques. Chacun de nous, prolétaires, vit quotidiennement ce désastre dans sa chair. Nous soulignerons seulement quelques aspects essentiels de la situation mondiale pour illustrer la profondeur de la catastrophe actuelle et mettre en évidence d'une part, la violence avec laquelle ce mode de production est aujourd'hui confronté à ses propres limites historiques et, d'autre part, l'inéluctabilité d'une catastrophe généralisée à l'ensemble de l'humanité si celle-ci n'arrive pas à détruire toutes les relations sociales marchandes et salariales qui l'écrasent.
"L'homme est un loup pour l'homme", la guerre de chacun contre tous, a toujours été la base de cette société et aucune communauté fictive étatique et nationale, aucune réforme, aucune utopie, aucune tentative d'"humaniser" la société n'a pu modifier cette réalité. Mais alors que par le passé, on essayait de cacher cette réalité, on en était honteux, on parlait d'aider les pauvres, aujourd'hui, on revendique ouvertement cette monstruosité comme quelque chose de nécessaire. Jamais le capitalisme n'avait assumé à ce point le discours libéral, jamais dans l'histoire de ce système on avait plus ouvertement affirmé que la croissance de cette société réclamait la misère des masses, que le fameux développement économique requerrait notre sacrifice et la matraque contre tout qui se rebifferait. Les discours et les recettes du FMI, que la bourgeoisie jugeait jadis comme un Manifeste et une pratique économique de l'ultra-droite, sont devenus, ces dernières années, l'unique politique économique envisageable; même le modèle "économique" (2) prôné par Pinochet pour sortir de la crise est aujourd'hui à la mode et les secteurs bourgeois qui ne l'acceptent pas se marginalisent sensiblement.
Une fois de plus, le capital s'est moqué de tous ceux qui avaient
la prétention de le contrôler; il a clairement démontré
que c'est lui qui commande et que les individus qui prétendent
le diriger ne sont rien d'autres que ses exécutants (3). Avec la
puissance asservissante et anthropophage qui le caractérise, le
Capital a en effet détruit toute velléité réformiste
et humaniste pour laisser clairement établi que dans cette société
il n'y a qu'un dieu: le profit.
"(...) le développement maximum de
la force productive conjointe à l'expansion maximale de la richesse
existante coïncidera avec la dévalorisation du capital, l'avilissement
du travailleur et l'épuisement exacerbé de ses forces vitales.
Ces contradictions conduisent à des explosions, à des cataclysmes,
à des crises, au cours desquels par la suspension momentanée
du travail et l'anéantissement d'une grande partie du capital, ce
dernier est violemment réduit jusqu'au point où, sans se
suicider, il est à nouveau en situation de pleinement réutiliser
sa capacité productive. Cependant, ces catastrophes qui se répètent
régulièrement, se répètent à un niveau
supérieur et conduisent finalement à la destruction violente
du capital."
Marx, Grundrisse |
Mais, alors que la réalité ne pouvait être plus crue et que le capitalisme mondial s'enfonçait dans une dépression généralisée, les masses prolétariennes, imbécillisées par la télé, la vidéo, les journaux et autres bourrages de crâne, ne voyaient pas venir la crise; comme toujours, la conscience fut à la traîne. Les Etats-Unis, le Japon, l'Allemagne,... purent continuer à se présenter comme les modèles libéraux de croissance économique par excellence. La catastrophe économique du capitalisme à l'Est fut si rapide et si violente, qu'on put, a contrario, continuer à vendre le vieux mythe de la "supériorité du capitalisme libéral" comme l'unique modèle économique exempt de crise.
Ni la clarté et ni la brutalité du discours affirmant que tout développement nécessite misère et sacrifice n'entravèrent l'expansion du modèle U.S. comme objectif à atteindre, modèle qui se vendait "for export" (parce qu'aux Etats-Unis mêmes, la catastrophe avait atteint un stade impossible à masquer (4). "For export", parce qu'aux Etats-Unis mêmes, le modèle américain s'était irrémédiablement effondré et ne pouvait plus servir d'exemple aux millions de prolétaires qui, sur place, enduraient misère et chômage. Dans ce pays, le modèle était déjà passé de l'état de projet à celui de réalité en putréfaction; le sacrifice au nom d'un développement à venir n'avait plus de raison d'être puisqu'il était impossible de cacher que ce développement s'opposait aux intérêts immédiats et historiques de l'espèce humaine. En pleine période de croissance économique la misère grandissait (en termes relatifs et, sur certains aspects, même en termes absolus), pire encore, tous les aspects de la vie humaine allaient en se détériorant: accroissement du nombre de sans-abris, détérioration de la santé, faim, exacerbation du racisme propre au capital, augmentation du nombre d'assassinats, de viols et de délits de sang en général, pollution généralisée, toxicomanie massive, militarisation de la vie quotidienne,...
Les Etats-Unis n'en restaient pas moins le modèle à exporter parce que, depuis plusieurs décades, ils constituaient la locomotive du capitalisme mondial et représentaient l'antithèse par excellence de la prétention (aujourd'hui en faillite totale) de contrôle et de planification du capital incarnée par l'URSS et ses alliés (c'est en ce sens que l'économie des Etats-Unis était le symbole même du "capitalisme triomphant"). La perpétuation du modèle américain trouvait également sa source dans le décalage qui sépare toujours la réalité économique d'un pays et la façon dont celle-ci est portée à la connaissance du public (médias), ainsi que dans le fait que, tandis que les administrateurs politiques du capital sont obligés (par le Capital lui-même) de chercher des réalisations immédiates, les analystes et les technocrates qui préparent la théorie pour les moyens de diffusion internationaux au travers desquels nous appréhendons la "réalité" (ou plutôt la vision qu'ils nous en livrent), les analystes et les technocrates donc, peuvent, quant à eux, se permettre d'édulcorer la réalité, de fabriquer l'image (c'est d'ailleurs leur raison d'être!). Bien sûr, on admettait qu'aux Etats-Unis tout n'était pas rose, mais c'était le maximum auquel on pouvait aspirer.
Nous ne nous étendrons pas ici sur la signification profonde de tout ceci pour la survie du système, sur le fait que la classe dominante n'a d'autres horizons à offrir que cette misérable perspective; mais soulignons quand même que le modèle de ce monde, la "société du bien-être", ne dépasse pas l'image édulcorée des Etats-Unis.
Dans les zones du monde où "l'anti-impérialisme" yankee constituait une puissante idéologie de contrôle du prolétariat, l'image positive des U.S.A. était plus puissante encore: on prétendait non seulement (quand on la reconnaissait) que, là bas, la misère "n'était pas comparable" parce que "c'était un pays riche", "un pays développé", avec un Produit National Brut d'autant de dollars par tête d'habitant; mais en plus, en coïncidence totale avec les intérêts de la bourgeoisie de ce pays et du monde entier, on atténuait jusqu'à l'effacer, l'importance de la lutte historique menée par le prolétariat dans ce pays. Le mythe de "l'aristocratie ouvrière" permit ainsi d'occulter systématiquement le caractère explosif des contradictions et l'importance historique de la lutte de nos frères de classe face au capital et à l'Etat.
L'actuelle dépression économique mondiale qui frappe tout particulièrement le centre du système, l'espace productif des Etats-Unis, rend cette contradiction encore plus totale. La catastrophe de la réalité économique et sociale de ce pays entre de plus en plus profondément en contradiction avec son affirmation comme seule alternative valable du capitalisme.
Il y a un an, dans Communisme No.36 (juin 1992), nous soulignions, dans un article intitulé "Quelques records du modèle économique mondial: USA", quelques chiffres que nous considérions révélateurs de la situation locale précisément parce qu'ils sapaient fondamentalement la mythologie dominante entretenue tant par les tenants du modèle américain (le modèle à imiter), que par ceux qui tentent d'occulter la misère réelle de ce pays (grâce à la théorie de l'impérialisme) et contribuent ainsi à la division internationale du prolétariat.
Il est sans doute difficile de se faire une représentation mentale de ce que reflètent les chiffres suivants:
Il fut tout aussi difficile de faire entendre qu'avant le Cordobazo en Argentine, avant '68 en France et '69 en Italie, avant même les grandes luttes prolétariennes en Chine connues (et dévoyées) sous le nom de "révolution culturelle", la vague de lutte prolétarienne avait fondamentalement commencé en Amérique du Nord, au sud des Etats-Unis, au nord de l'Amérique Latine, à Saint Domingue, à Mexico,... PRINCIPALEMENT DANS LES GHETTOS NOIRS ET HISPANOPHONES DE LOS ANGELES.
La révolte de nos camarades de Los Angeles en mai 1992 annonce l'agonie du mythe des Etats-Unis comme modèle à suivre et constitue un jalon important pour les luttes actuelles du prolétariat international. Le fait que les Etats-Unis ne puissent pas se maintenir comme modèle du capitalisme mondial, pas plus qu'il ne peut se présenter en tant qu'espace épargné par la vague internationale de révoltes prolétariennes qui secouent le monde, tout cela exprime un pas qualitatif dans la nature même de ces luttes et balaye toute illusion quant au caractère particulier qu'on aimerait trouver pour expliquer à chaque fois l'origine de ces luttes.oOo
Grâce à cette révolte où nos camarades prolétaires de Los Angeles attaquèrent l'Etat et ses représentants, grâce à la force avec laquelle ils se dressèrent ouvertement contre le monde de la propriété, les derniers relents enchanteurs du modèle américain ou des prétendues différences existant entre le prolétariat de ce pays et celui du reste du monde, ont volé en éclat.
Lorsqu'en Pologne ou en Roumanie éclatèrent les révoltes, on invoqua la dictature et les défauts bureaucratiques du "socialisme"; lorsqu'en Algérie, au Maroc ou en Afrique du Sud, le prolétariat s'affronta violemment au pouvoir bourgeois et s'appropria tout ce qu'il pouvait on invoqua les tares propres au continent le plus retardé de la terre et à son sous-développement séculaire; lorsque les prolétaires du Venezuela et d'Argentine s'attaquèrent à la propriété privée et à l'Etat, on maquilla la lutte derrière de simples pillages provoqués par la faim et propres à un pays du "tiers monde"; lorsque en France ou en Angleterre (Vaux-en-Velin et Trafalgar Square notamment) s'exprima la même rage, on incrimina les immigrants marginaux appartenant au "quart monde"; et, aujourd'hui, alors que c'est au centre même du système capitaliste qu'éclatent les révoltes et que, de Los Angeles, la "contagion" s'étend aux banlieues de Toronto, Washington et New York, que peuvent donc faire les bourgeois du monde entier si ce n'est clamer qu'il ne s'agit que "d'une affaires de noirs", "d'une question d'immigrés", "d'un problème entre noirs et latinos"... Mais une version aussi absurde que celle-là sera indubitablement difficile à faire avaler et il ne fait aucun doute que, même pour la bourgeoisie, la crédibilité du modèle américain commence sérieusement à battre de l'aile.
Pour la bourgeoisie mondiale, un modèle de développement est attrayant tant qu'il rapporte. Il peut le rester même si le prolétariat meurt de faim (c'est d'ailleurs une condition historique de tout développement intensif de l'industrie!) et que ses villes modèles se remplissent de chômeurs et de mendiants. Mais son charme s'évanouit si les prolétaires se rebellent et remettent en question l'ordre établi.
C'est pourquoi, lorsque Bush fut obligé de réprimer dans le sang la révolte de Los Angeles, le mythe du modèle nord-américain disparut comme par enchantement. Tous les pairs du géant industriel mondial prirent leurs distances. Présidents, ministres, chefs de parti,... clamèrent leur opposition au modèle nord-américain et justifièrent la révolte comme propre aux caractéristiques des Etats-Unis; entendez: inimaginable dans leur pays. La rengaine est invariable et constante: le prolétariat ne lutterait pas contre la misère capitaliste mais contre "les abus racistes propres aux Etats-Unis, "ce qui ne pourrait se produire ici puisque les racistes sont condamnés"... ou encore: la lutte du prolétariat est "due au 'néolibéralisme'", "c'est la conséquence de la reaganomania", "de la diminution du budget social", "de la politique sociale des dernières administrations qui ont conduit à une marginalisation croissante", etc.
Ces justifications boiteuses servent à occulter que la révolte du prolétariat de Los Angeles est dirigée contre les ennemis qui nous oppriment et qu'elle exprime nos intérêts à tous, prolétaires du monde entier. Il faut cacher qu'en réalité, sous toutes les latitudes, le système est identique, que la lutte des prolétaires de Los Angeles est nôtre, et que, lorsque nous luttons contre la bourgeoisie de "notre" pays, nous sommes du même côté de la barricade que nos camarades de Los Angeles.
Il nous faut ajouter, bien que dans cet article nous n'insisterons pas sur cet aspect, que les communistes ont toujours dénoncé cette manoeuvre, ce gigantesque mensonge (6) et qu'ils n'ont cessé d'affirmer que rien de tout ceci n'est étranger à la nature du capital, au contraire, que le développement le plus pur de ce dernier produit crises, guerres, chômage, misère, racisme, etc.
Ce qui a changé, aujourd'hui, avec la vertigineuse dépression mondiale, c'est que le capital se retrouve sans pôle positif, sans pays-modèles-à-imiter, sans gestionnaires ni gouvernants qui "savent ce qu'ils font", sans entreprises idéales qui tracent la voie, etc.
Actuellement (octobre 1992), non seulement aux Etats-Unis les entreprises ferment les unes après les autres, la misère ne cesse de croître et la décomposition sociale atteint des sommets jusqu'ici inégalés, anéantissant le mythe d'une économie américaine étrangère à toute crise, mais en plus les pays, tels l'Allemagne ou le Japon, qui étaient considérés, il y a deux ans, comme des modèles de croissance, de dynamisme et de développement des forces productives, sont aujourd'hui gravement touchés par la dépression généralisée.
Ainsi par exemple, la Bourse de Tokyo, représentant suprême du "dynamisme japonais" et ex-modèle pour les investisseurs du monde entier, n'a cessé de s'effondrer depuis 1989: l'indice qui cette année-là atteignait 38.600, ne dépassait plus 14.300 à l'été '92, ce qui représente une chute de 63%. En ce qui concerne les autres modèles de développement, la situation n'est guère plus brillante. En effet, toute l'Europe occidentale s'enfonce dans une dépression généralisée: le système des parités monétaires, considéré comme le plus solide de tous, a volé en éclat. Londres annonce tous les jours faillites et fermetures d'entreprises dans tout le Royaume Uni, l'économie italienne se noie dans le chaos et les autres pays résistent tant bien que mal.
Les entreprises les plus représentatives du progrès et du dynamisme capitalistes annoncent faillites, diminutions de profit, licenciements massifs...
Des secteurs entiers, représentatifs du progrès, tels les transports aériens, coulent à pic. Sur le plan international, la Pan American est certainement le cas le plus typique parce qu'elle constitue la carte de visite de l'Etat Nord américain. Mais, aux Etats-Unis, bien d'autres compagnies telles TWA, Eastern ou Braniff se trouvent dans la même situation. Sur les autres continents la conjoncture n'est guère meilleure: Lufthansa, Air France, SAS, Sabena,... annoncent des pertes de plus en plus menaçantes et Aeroflot, la compagnie qui possède la plus grande flotte aérienne et le plus grand nombre d'heures de vol au monde, affronte également de graves difficultés.
Les grandes entreprises modèles de chaque secteur annoncent des pertes et des licenciements. Dans l'industrie automobile, par exemple, la General Motors qui est non seulement la plus grande entreprise du monde quant au nombre d'ouvriers, d'actionnaires, etc. mais qui symbolise aussi historiquement le capitalisme social et démocratique nord américain (7), annonce des pertes énormes et la réduction drastique de son personnel. Ford et Chrysler signalent aussi des pertes importantes. D'autres branches sont confrontées à des problèmes identiques: La plus grande entreprise de communications du monde, ATT, a vécu en 1991 la pire année de son existence et a subi plusieurs milliers de millions de dollars de perte. Les résultats pour l'année 1992 ne s'annoncent pas meilleurs. Le géant de l'informatique, IBM, n'arrête pas de revoir ses calculs, prévoit des réductions de bénéfices, des changements de stratégie, des restructurations et des licenciements massifs. NCR et Digital Equipment licencient eux aussi massivement.
Rien d'étonnant à ce que, avec de tels "modèles" de dynamisme, de développement, de démocratie, d'efficacité économique,... la croissance du Produit National Brut mondial soit aujourd'hui pour la première fois quasiment nulle, et que toutes les estimations prévoient (pour la première fois également) une diminution du commerce international mondial en volume (approximativement 3%) et en valeur (approximativement 1,5%).
En moins de temps qu'il n'en fallut à la bourgeoisie mondiale pour s'aligner sur l'apologie du libéralisme, les différents administrateurs, les gestionnaires, les économistes,... recommencèrent à réclamer l'intervention de l'Etat. En un éclair les défenseurs les plus acharnés de la "main invisible" (c'est-à-dire d'une régulation automatique de la vie économique, sans intervention de l'Etat) se mirent à exiger telle ou telle mesure pour augmenter le crédit aux entreprises, telle ou telle autre pour augmenter la demande effective, et ils critiquèrent la gestion économique de telle ou telle administration jugée responsable du chaos croissant et manifeste.
Pour les révolutionnaires, rien de tout cela n'est étonnant. Le mythe de la main invisible régulant à la perfection l'économie, mythe auquel l'idéologie dominante donne tout son appui en période de croissance économique, vole en éclat dès que le capitalisme entre en crise. Les cycles capitalistes se déroulent selon un schéma qui varie peu. En période de dépression, toutes les fractions bourgeoises luttent contre la tendance à la baisse du taux de profit et ressentent cruellement dans leur chair que les marchés sur lesquels écouler leurs produits se rétrécissent comme une peau de chagrin et s'avèrent incapables de se développer au rythme que nécessiterait leur accumulation (9). Ces fractions bourgeoises appellent alors de tous leurs voeux les interventions politiques pour protéger le processus d'accumulation de la dévalorisation inhérente à ce processus; soit en contrecarrant autant que faire ce peut la tendance à la diminution du taux de profit, ce qui en général se concrétise par des augmentations du taux d'exploitation; soit en cherchant à élargir artificiellement les marchés grâce au crédit, à des dépenses publiques, à la militarisation de la vie sociale, etc. Encore une fois, il ne s'agit aujourd'hui que d'une répétition du passé.
Pourtant, si le schéma varie peu, la situation, elle, évolue parce que chaque crise est plus aiguë que la précédente, parce que les contradictions dissimulées et différées par le passé éclatent maintenant plus violemment que jamais, parce que chaque politique économique utilisée pour augmenter artificiellement la demande effective se transforme en problème supplémentaire, parce que dans tous les domaines le capital se trouve confronté à ses limites historiques.
Ainsi par exemple, les entreprises qui, grâce à différentes formes de protection (subsides, protection commerciale, crédit subsidié, etc.), se maintiennent à flot, en contradiction totale avec la loi de la valeur qui les condamne à fermer et à licencier l'ensemble de leur personnel: ces entreprises s'éloignent à chaque cycle économique d'une rentabilité "naturelle" (c'est-à-dire d'une rentabilité obtenue grâce à la fameuse "main invisible") et leur maintien exige chaque année plus de subsides, plus de crédit bon marché, plus de protection économique pour fonctionner. Ce procédé, qui consiste à augmenter annuellement le déficit public pour poursuivre le financement de ce qui n'est plus viable économiquement, s'avère de plus en plus périlleux et entre en contradiction flagrante avec d'autres secteurs du capital qui n'acceptent pas que l'Etat redistribue leur plus-value pour remettre à flot de vieilles entreprises totalement dévalorisées. Pour le capital le dilemme s'intensifie: il y a d'une part les nécessités "naturelles" de fermer des usines, de produire des millions de nouveaux chômeurs, de développer plus encore la misère, ce qui, en retour, réduit plus encore la demande effective et tend à provoquer d'inévitables explosions sociales et, d'autre part, le fait de continuer à postposer cette vérité économique, en sachant parfaitement que la faillite généralisée n'en sera que plus violente. Ce type de problème ira en se généralisant et embrasera un nombre toujours plus élevé de pays ou de groupes de pays jusqu'à ce que la situation devienne insoutenable et que la fraction bourgeoise qui se trouve au gouvernement soit balayée par une autre qui, arborant à son tour le drapeau du libéralisme, annoncera immanquablement l'heure de la vérité. Ce fut le cas, il y a quelques décades en Amérique Latine avec le populisme industrialiste; c'est également ce qui s'est passé ces dernières années dans les "pays de l'Est" tels que l'URSS, la Roumanie, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Hongrie,... (10) et c'est la tendance actuelle de pays comme les Etats-Unis ou l'Angleterre, par exemple.
L'augmentation artificielle de la demande sur base du crédit public et privé, des dépenses publiques ou de la "politique sociale" a permis au capitalisme de continuer à fonctionner, mais aussi de se sortir de situations de dépression et d'entrer provisoirement dans une phase d'expansion. Les Etats-Unis en particulier représentent un excellent exemple de capitalisme national propulsé au-delà de ses limites sur base d'une création artificielle de demande "solvable". Dans ce pays, bien plus que dans d'autres, les dépenses publiques ont atteint des niveaux faramineux (principalement dans le domaine de l'industrie militaire). On a agit comme s'il n'y avait aucune limite au crédit à l'industrie privée et on a multiplié, à des taux inédits et uniques au monde, le crédit au "consommateur" final en rapport avec ses revenus. Cette politique put, aux Etats-Unis, être plus poussée qu'ailleurs étant donné la possibilité qu'a ce pays d'émettre des signes de valeur en nombre apparemment illimité, non seulement en tant que politique expansive interne, mais aussi par le rôle du dollar sur le marché mondial en général (en effet, malgré la faillite des accords de Bretton Woods, les Etats-Unis continuent à fonctionner comme banque centrale du système capitaliste mondial) ainsi que sur les marchés intérieurs de nombreux pays. Cela a permis l'augmentation de la demande sans pour autant créer immédiatement (tel que ça se passe dans d'autres pays lors d'émissions inconsidérées) la dévalorisation généralisée du signe de valeur, la circulation absorbant une quantité aujourd'hui incalculable de ce dernier. Au début des années '70, alors que le capitalisme mondial se trouvait confronté aux limites objectives de l'expansion consécutive aux destructions occasionnées par la guerre, cette politique permit de financer les successives expansions d'après-guerre (11). L'économie nationale des Etats-Unis s'affirma comme locomotive indiscutée du capitalisme mondial grâce à cette politique.
Il convient de se rappeler que si le libéralisme reaganien (ou thatcherien) semblait anti-interventionniste, allant jusqu'à flirter avec les idéologies de l'anarcho-capitalisme à la mode (12), c'est qu'il prônait clairement l'abandon de toutes les illusions sociales au sein du capitalisme, et que sa politique anti-impôts sur le capital s'accordait parfaitement aux coupes sombres opérées dans l'ensemble du "budget social". Les conséquences de cette politique amenèrent une recomposition de courte durée (la seule chose à laquelle on pouvait aspirer) du principal moteur de l'économie capitaliste, le taux de profit, en même temps qu'intervenait une diminution relative du salaire dans le revenu national (c'est-à-dire une augmentation nette du taux d'exploitation). Pourtant on n'eut pas le courage de pousser à bout cette politique et d'abandonner également l'ensemble de la politique de crédit (13), ce qui aurait provoqué une catastrophe plus rapide et plus grave encore. Tout au contraire, on tenta de combiner l'augmentation généralisée du taux d'exploitation (due à la réduction de l'ensemble des rémunérations de la force de travail - y compris les allocations aux chômeurs, aux pauvres,...) et la diminution des impôts (14), avec une expansion généralisée du crédit patronnée par l'Etat. Ce qui se concrétisa par le déficit fiscal accumulé le plus gigantesque de l'histoire mondial du capitalisme. Tandis que tous les discours officiels se targuaient de libéralisme (et en particulier le programme des objectifs de Reagan d'abord, puis de Bush) et promettaient de réduire, voire d'éliminer le déficit fiscal, il demeurait évident que la réalité capitaliste incitait au maintien d'une économie basée sur la dépense publique (en particulier l'économie de guerre), à l'application d'un keynésianisme à peine voilé derrière les discours adaptés au credo des "Chicago boys".
Dans la mesure où, malgré l'expansion du crédit et du déficit fiscal, cette politique économique s'épuisait et où la croissance économique faisait faux-bond, les illusions s'évanouirent. La classe dominante mondiale, quant à elle, ne cessa de présager l'arrivée imminente d'un souffle nouveau, d'une expansion économique accompagnée des fantastiques politiques économiques qui mettraient un terme à l'actuelle dépression, bref l'avènement d'un nouvel âge d'or. Aujourd'hui encore, malgré la détérioration évidente de l'économie mondiale et principalement des plus grands exemples d'économie nationale triomphante (Etats-Unis, Japon, Allemagne, Angleterre, Italie,...), pas un jour ne passe sans que, tel ou tel politicien, tel ou tel fonctionnaire, telle ou telle chaîne de télévision ne nous annoncent la politique économique qui nous sortira de la crise et nous ramènera au règne doré de la prospérité capitaliste.
Mais au-delà de toutes ces belles paroles et de ces bonnes intentions, le procédé reste identique: diminution des taux d'intérêts (fondamentalement à travers la réduction du taux d'escompte des Banques Centrales pour faciliter le crédit et l'investissement) et augmentation des dépenses publiques; ce qui ne peut se réaliser qu'en augmentant toujours plus la dette privée et publique, interne et externe.
C'est exactement ce qui s'est fait jusqu'à présent à
des niveaux incalculables et c'est précisément l'origine
du chaos généralisé. Tous les discours, toutes les
promesses de politiques expansionnistes ne servent qu'à injecter
un peu plus de morphine au capitalisme moribond.
"La production capitaliste tend sans cesse
à dépasser ces limites qui lui sont immanentes, mais elle
n'y parvient qu'en employant des moyens qui, de nouveau et à une
échelle plus imposante, dressent devant elle les mêmes barrières."
K. Marx, Le Capital, tome III, p. 244 |
En 1985, dans un article consacré aux mythes existant à propos de la dette extérieure "des pays latino-américains", nous avions déjà mis en évidence qu'il ne s'agissait pas d'un phénomène particulier mais d'une situation généralisée et insoluble du capitalisme mondial:
"Devant la fin de la phase expansive consécutive à la seconde guerre mondiale (dans toute l'histoire du capitalisme les guerres, les reconstructions, les déroutes du prolétariat,... constituèrent les antécédents inévitables qui rendirent possible un développement "sain"), le capitalisme mondial a uniquement réussi à reporter les dépressions catastrophiques, créant une masse impressionnante de capital fictif. Les niveaux atteints à ce sujet, non seulement en termes absolus, mais en termes relatifs à la production mondiale sont de très loin supérieurs à tout ce que l'on a pu voir dans le passé; bien plus, sur le plan international règne la plus gigantesque anarchie et l'absence de contrôle généralisé dans la relation entre deux magnitudes, ceci laissant prévoir que dans une des phases dépressives les plus proches, cette situation sera multipliée (ou mieux dit, élevée à une puissance aux conséquences imprévisibles) par la destruction massive et brutale de capital fictif qui fera exploser toutes les contradictions de ce système social à un niveau totalement inconnu jusqu'à présent. Les différentes phases de crédit facile et généralisé de l'après-guerre, l'endettement massif de tous les gouvernements, ainsi que la création effrénée de signes de valeur qui, au fond, ne représentent aucune valeur, correspondent aux 'décollages' chaque fois plus court et plus pauvres de l'économie mondiale. Cette 'dope', cette espèce de drogue administrée à un corps épuisé, a eu à chaque cycle un effet stimulant qui a fait fonctionner le système de reproduction international élargi du Capital comme si le système était un gamin,.. jusqu'à ce que l'effet passe, jusqu'à ce que les doses de plus en plus fortes deviennent insuffisantes et que dans le même temps le remède commence à faire empirer la maladie, et que... de plus en plus le Capital apparaisse pour ce qu'il est effectivement, un vieux décrépi et putréfié sous morphine.L'augmentation de la dépense et de la dette publiques ont donc constitué les remèdes historiques qui permirent, dans chaque pays et pour une période donnée, une certaine croissance au-delà des limites mêmes de la production. Au niveau mondial, on eut chaque fois plus recours à ces thérapeutiques et on peut affirmer que la production et le commerce mondial de ces dernières décades ne continuèrent à fonctionner "convenablement" que grâce à cette politique,... mais c'est précisément ce qui a conduit à l'actuelle situation d'impossibilité de payements, où la perpétuation de cette politique économique n'est plus réalisable. Et le pire pour le capital mondial, c'est que même le rythme actuel de croissance, pourtant quasi nul, ne pourra être maintenu que par une augmentation de la dette internationale, c'est-à-dire par l'application d'une politique économique précisément insoutenable aujourd'hui par le Capital. Et tout le paradoxe est là: chaque tentative pour empêcher qu'il ne s'écroule rend le Capital plus fragile encore, plus dépendant d'une assistance qui ne fait que le rapprocher de la tombe.Pour le prolétariat, seule perspective existante pour l'espèce humaine, le fait de dévoiler cette dynamique mondiale infernale est fondamentale: contre tous les mythes dominants, il est décisif de mettre à jour que la dette (ou plutôt l'actuel endettement généralisé et insoluble) n'est ni plus ni moins qu'une des manifestations les plus remarquables de l'anarchie et de la fin historique d'un système qui englobe la totalité du genre humain."(15)
"... une conscience révolutionnaire
ne peut se forger que lors de crises capitalistes; c'est ce que démontre
à suffisance le réformisme et l'opportunisme de la classe
ouvrière au cours des périodes d'expansion du capitalisme.
Cela signifie que la crise fournit la prémisse nécessaire,
mais non suffisante, aux actions révolutionnaires, et qu'il faut
faire attention non seulement aux circonstances qui forgent cette conscience,
mais aussi à la conscience elle-même."
Paul Mattick in "Ecroulement du capitalisme ou sujet révolutionnaire" - 1972 |
Il y a un peu plus de dix ans, la catastrophe financière était telle que la plupart des pays d'Amérique Latine et d'autres continents émirent la menace d'une cessation de payements; du coup, on restreint les crédits pour une partie importante de ceux-ci, ce qui démontra clairement les limites historiques de cette politique de prêts à n'importe quel prix pour pouvoir vendre. La même situation se présenta un peu plus tard avec différents Etats africains (et cela bien qu'en différentes occasions, ces pays déclarèrent nulles des dettes importantes) et certains pays de l'Est. Il y eut ensuite une très courte période pendant laquelle la bourgeoisie mondiale se chérit l'illusion (16) que la croissance pouvait se poursuivre "malgré tout" et cela, grâce à la prétendue "nouvelle demande effective" qui venait de l'Est. Mais ces illusions faciles s'évanouirent rapidement et, là aussi, on appliqua la politique des crédits faciles pour créer des acheteurs solvables là où il n'y a que des nécessités,... politique qui s'épuisa à son tour en quelques années. Simultanément, dans les autres endroits du globe, on en était également arrivé aux limites que nous connaissons aujourd'hui: les Etats-Unis en sont l'exemple le plus évident; si nous comptabilisons la dette des entreprises, des consommateurs et du gouvernement central de ce pays, nous obtenons un chiffre supérieur à 10,000 milliards de dollars, ce qui équivaut à deux années de production nationale dans ce pays!
En dépit de tous ces efforts, de toutes ces thérapeutiques pour revitaliser le Capital, en dépit de l'existence de tels acheteurs artificiels, et malgré la masse d'investissements financés à l'aide de la dette, malgré l'ampleur de la demande fictive créée grâce au multiplicateur keynésien (17), aujourd'hui, en ce début 1993, les promesses de "fin de récession" s'écroulent les unes après les autres.
Mais existerait-il par hasard d'autres possibilités inexplorées par le Capital pour dépasser l'actuelle dépression généralisée? Existerait-il d'autres politiques bourgeoises que le type de politique appliquée jusqu'à aujourd'hui?
La réponse est non. Catégoriquement non !!! (18)
Les décisions ne sont prises ni par le Capital mondial, ni par le Capital en général, mais par chaque capital particulier, chaque particule de capital. C'est la raison pour laquelle, dans des situations sans issues, sans solution capitaliste générale, telle celle que nous connaissons actuellement, la décomposition du capital en particules s'accélère, la concurrence s'exacerbe et le "sauve qui peut" général (la véritable règle de cette société) se concrétise par le fait de marcher sur la tête de l'autre pour pouvoir subsister.
Cet "autre" est en premier lieu le prolétariat bien sûr, son "propre" prolétariat, et le capitaliste ne lésinera sur aucun effort pour augmenter le taux d'exploitation. Mais l'"autre" s'incarne également dans le bourgeois concurrent que le capitaliste est prêt à détruire, si nécessaire, en menant la guerre commerciale jusqu'à ses ultimes conséquences: la guerre militaire.
Il ne s'agit donc pas de ce que le capitaliste veut ou ne veut pas, il ne s'agit pas de savoir s'il est de "gauche" ou de "droite", s'il est président d'une multinationale ou de l'Etat cubain, il s'agit de ce que chaque capitaliste est obligé de faire conformément à ce qu'il dirige, à ce dont il assure la gestion. Comme dirait Marx, il n'est rien d'autre que la créature de la valeur qui se valorise, du rapport social qui se reproduit (19) et en ce sens, il n'est pas responsable de ce qu'il fait puisqu'il est obligé de le faire ainsi. De notre point de vue, cette affirmation est décisive pour éliminer toute illusion quant à la capacité de tel ou tel capitaliste, de tel ou tel gouvernant à ne pas respecter ce que le capital lui impose (20).
Telle est l'explication générale de ce qui se passe actuellement et que nous vivons quotidiennement: les restrictions toujours plus fortes, l'accroissement de la misère des prolétaires, l'augmentation du chômage,... c'est l'explication de la guerre toujours plus dure menée contre le prolétariat. Et c'est également l'explication de l'augmentation incessante des guerres locales, de l'accentuation toujours plus forte des guerres interbourgeoises qui se concrétisent par le protectionnisme, par la rupture des accords commerciaux, par l'impossibilité d'aboutir à des accords durables comme nous le voyons avec l'échec réitéré du GATT (21), par la rupture des anciennes alliances (et n'oublions pas que les pays et les unions de pays ne sont rien d'autre que cela: des alliances interbourgeoises visant à affronter d'autres capitaux!), par la rupture de blocs commerciaux et militaires, par la constitution de nouvelles constellations impérialistes,...
Or, il est clair que les mesures d'austérité, la diminution du salaire réel, l'augmentation de l'intensité et de l'extension du travail afin d'obtenir le même résultat productif avec moins d'ouvriers (c'est-à-dire en payant moins de salaires), l'ensemble des mesures de libéralisme généralisé qui se traduisent par une croissance nette du taux d'exploitation et du taux de profit du capital particulier, y compris lorsque cela s'applique à un pays entier (et les bourgeois de ce dernier en bénéficient), toutes ces mesures sont préjudiciables au capital en général dans le sens où elles réduisent la demande effective mondiale. C'est ce qu'a appliqué, par exemple, un gouvernement comme celui de Pinochet. La diminution violente du salaire réel (et plus encore du salaire relatif), l'augmentation du taux d'exploitation et de profit ont attiré les capitaux du monde entier et permirent une croissance nationale accélérée. Mais, de façon logique, l'excès de plus-value ainsi produite ne pouvait se réaliser à l'intérieur du pays et devait inévitablement, pour se réaliser, être introduite sur le marché d'autres capitaux nationaux; cela met clairement en évidence que ce type de politique est une politique à court terme, ou si l'on veut, qu'elle doit nécessairement butter contre les prolétaires, mais aussi contre les autres capitaux nationaux, et qu'elle ne peut en aucune manière apporter de solution au niveau du Capital global.
Mais la politique nationale, soit-disant antagonique, qui consiste à augmenter la demande fictive et par laquelle l'Etat national tente de gérer la contradiction entre capital particulier et capital global, n'apporte pas plus de solution globale et aboutit également à la guerre. Face à la tendance de chaque capital particulier à augmenter démesurément le taux d'exploitation et de profit, l'Etat "national" représente toujours un niveau plus élevé de généralité du Capital (22). Les gestionnaires de l'Etat et ses idéologues, ses économistes, ses sociologues, etc., en plus de faire l'apologie des rapports sociaux existant, essayent tous sans exception et avec un succès relatif de s'élever à ces niveaux d'abstraction et de faire appliquer une politique économique de discipline du capital particulier non seulement sur base d'un effort gouvernemental (dépense publique, déficit fiscal,...), mais aussi en établissant certaines normes et obligations pour le capital particulier (salaire minimum, maximum d'heures de travail,...), ce qui permet à l'Etat de présenter -outre le bâton- un ensemble de carottes qui justifient mieux sa fonction "bénéfique de l'ensemble de la société" (23). Tous les régimes populistes ont essayé cette politique bourgeoise, de Hitler à Fidel Castro en passant par Staline et Roosevelt... bien que sa théorisation la plus achevée, son explication la plus globale ait été le keynésianisme. Mais cette politique ne peut être qu'une politique à court terme, étant donné qu'à long terme toutes les contradictions sont postposées, s'accumulent, s'exacerbent (24); elle ne peut être que nationale, et non mondiale, puisqu'elle est contradictoire à la compétitivité internationale des entreprises de ces pays et que, tôt ou tard, elle aboutira à l'accumulation de déficits dans la balance commerciale et la balance des payements et à l'accentuation de la nécessité du protectionnisme; elle débouchera sur la confirmation de sa faiblesse dans la guerre commerciale, ce qui posera inévitablement la nécessité de prolonger cette politique sur le terrain militaire. Il est clair aussi qu'on ne peut pas uniquement engager des gens pour faire des trous et les reboucher ensuite et que ce qui dynamise le plus l'économie nationale c'est l'économie de guerre. Et comme d'autre part, le capital national considérera chaque fois plus comme ennemis ceux qui se trouvent en face de lui, ceux qui s'approprient "ses" matières premières, ceux qui proposent les mêmes produits moins chers et prennent sa place sur le marché,... il se verra toujours plus poussé à la guerre. Cela signifie que cette politique conduit également à la guerre impérialiste, et ses théoriciens les plus conséquents, tel Keynes lui-même, n'ont jamais eu beaucoup de scrupules à admettre que si la guerre était nécessaire pour sauver le capitalisme, il fallait faire la guerre.
Tout cela conduit donc à la multiplication des guerres locales, à la décomposition des anciennes alliances et nations, à la constitution de nouveaux fronts et constellations impérialistes,... à la généralisation de la guerre à la totalité de la planète. Telle est la perspective du capital.
Et cela, sans compter un ensemble d'accidents et de catastrophes quotidiens auxquels le Capital soumet la population mondiale, tels les accidents nucléaires ou ces villes où les enfants naissent avec des cerveaux plus petits et autres déficiences corporelles irréversibles transmises par la contamination dont souffrent leurs parents (25). C'est également sans compter avec le fait que ce que le Capital propose comme modèle (la vie dans une ville moderne, par exemple) ne peut être étendu au reste de l'humanité sous peine de voir périr la planète entière.
"Vous êtes unilatéraux", nous dira-t-on. Non. C'est le
Capital qui est unilatéral, son progrès même conduit
à la crise, à la destruction et à la guerre. Cette
société est une société anthropophage, le développement
du Capital se nourrit de l'être humain, le détruit, le tue,
l'engloutit. Et la situation actuelle à l'échelle mondiale
est une confirmation totale et irréfutable de notre conception du
monde, une confirmation catégorique de la théorie communiste.
"Tant que tout va bien, la concurrence (...)
joue pratiquement le rôle d'une amicale de la classe capitaliste:
celle-ci se répartit collectivement le butin commun proportionnellement
à la mise de chacun. Mais dès qu'il ne s'agit plus du partage
du profit mais des pertes, chacun cherche autant que possible à
réduire sa quote-part et à la mettre sur le dos du voisin.
(...) la concurrence se mue alors en un combat de frères ennemis.
Dès lors s'impose l'antagonisme entre l'intérêt de
chaque capitaliste individuel et celui de la classe capitaliste dans son
ensemble."
Marx, Le capital, Livre III, Chapitre IX, "Excédent de capital accompagné d'une population excédentaire". |
"La démocratie libérale peut constituer le point final de l'évolution idéologique de l'humanité et la forme finale de tout gouvernement humain, et donc être comme tel, le point final de l'histoire." (26)La réalité capitaliste mondiale se charge tous les jours de démentir les discours des apologues du système: il n'y a jamais eu autant de territoires en guerre, autant d'affrontements militaires et para-militaires localisés; jamais il n'y a eu un tel amas de cadavres dû aux guerres (et à la paix!), jamais dans l'histoire de l'humanité, le militarisme n'avait occupé autant d'espace dans la vie de l'humanité, jamais la production d'armement et sa commercialisation n'avaient occupé une place aussi importante, jamais (en termes absolus et relatifs) un nombre aussi grand d'êtres humains ne s'était vu confronté à la réalité quotidienne de la guerre (ou de la possibilité de son déclenchement à tout moment) avec toutes les conséquences que cela implique sur la vie.
Aujourd'hui la guerre est partout; pas un seul continent n'y échappe. La guerre fait rage dans l'ex-Yougoslavie, dans l'ex-URSS, en Somalie, en Turquie, en Irak, en Birmanie, aux Philippines, au Liban, au Tchad, en Amérique Centrale... et c'est sans compter d'autres guerres impérialistes comme celles de la drogue en Bolivie, au Pérou, en Colombie, au Brésil, qui attaquent elles aussi de front des millions de prolétaires. Dans chaque région il y a des dizaines de conflits interbourgeois dont l'unique issue possible est la violence. La plupart d'entre eux donne quotidiennement naissance à des guerres localisées, tandis que les autres se maintiennent comme affrontement potentiel... jusqu'à leur éclatement. Les politologues dénombrent, pour l'ex-bloc russe, 125 "foyers de conflits identitaires" dont 25 ont déjà donné lieu à de la violence armée. Presque chaque jour se produit un nouvel affrontement armé. Presque chaque jour, surgit une "nouvelle nation réclamant son auto-détermination". Chaque caricature de "république" de l'ex-URSS possède sa contradiction-maison parce que telle ou telle minorité veut déclarer son indépendance, presque quotidiennement on déclare un nouveau couvre- feu et on envoie une armée plus centrale s'opposer à une armée plus locale. Un jour, une puissance impérialiste, en accord avec ses intérêts expansionnistes, reconnaît le droit à l'auto-détermination ou l'indépendance d'un nouvel "Etat"; le jour suivant et au nom de ces mêmes intérêts, elle n'accepte pas l'auto-détermination d'un autre "petit Etat", en rapport avec le précédent et dans chacun de ces jeux de bourse et de chiffres, de spéculation et de profit, d'alliance et de rupture (27), s'accumulent des milliers de cadavres de femmes, d'hommes, d'enfants,... des milliers de mutilés, de blessés,... et le reste de la population de ces régions survit à peine parmi les ruines, la faim et le manque de tout. Pas besoin d'aller jusqu'en Somalie ou en Ethiopie (où la situation est chaque jour plus dramatique) pour constater que la population meurt de faim. Dans l'ex-URSS, malgré toute "l'aide" occidentale pour maintenir l'ordre bourgeois, la famine guette et on reconnaît officiellement que plus de 90% de la population vit dans la misère.
Il est vraiment impossible d'occulter plus longtemps le caractère destructeur et anthropophage de ce mode de production!!!
Partout, le Capital se trouve confronté à un ensemble de limites qui l'oppose totalement à l'espèce humaine et qui pose toujours plus l'obligation pour cette dernière de détruire le Capital pour ne pas être elle-même détruite.
Non seulement la croissance économique ne marche plus, non seulement les politiques économiques pour sortir de la dépression sont épuisées, non seulement tout ce que fait le capital le mène à la guerre, à la généralisation de la guerre et à son opposition historique avec l'humanité, mais encore, c'est jusqu'à la croissance économique du Capital elle-même qui ne peut conduire qu'à une aggravation de la catastrophe.
Croissance économique nulle; politiques économiques pour sortir de la crise épuisées; guerre, généralisation de la guerre et opposition historique avec l'humanité comme seule issue à toute tentative capitaliste et, pour unique résultat de la croissance économique du Capital: aggravation générale de la catastrophe.
Si aujourd'hui tous les modèles s'écroulent c'est parce que leur extension est devenue impossible, parce que toute projection hypothétique de la croissance économique actuelle permet de vérifier que celle-ci conduirait à une destruction généralisée des aspects les plus élémentaires de la vie humaine, parce que la terre entière périrait si le modèle des Etats-Unis s'étendait au reste de la planète, parce que l'utopie de la General Motors à l'échelle de l'humanité impliquerait la destruction du monde entier, parce que la planète et l'humanité ne pourraient survivre si New York (et les autres grandes villes) au lieu de comporter 20 millions d'habitants, en comptaient 50! (28)
La destruction de la couche d'ozone, la pollution généralisée de l'atmosphère, l'effet de serre, l'avancée de la sécheresse et du désert, la destruction des forêts qui permettent le renouvellement de l'atmosphère, le dramatique et croissant problème de l'eau potable,... et toutes leurs conséquences néfastes pour l'espèce humaine ne sont que des aspects isolés d'une gigantesque catastrophe planétaire que l'on ne peut que hurler à l'adresse de tous ceux qui n'ont rien à espérer de ce système, à tous ceux qui n'ont rien à attendre de la sortie de la crise tant annoncée et de la croissance économique capitaliste.
Partout, le capitalisme atteint la limite historique de ses possibilités d'existence et la grande tragédie pour l'espèce humaine est que le Capital perdure à ses dépends parce que nous ne sommes pas capables de le détruire.
Voilà bien le grand problème de l'humanité: la catastrophe, comme nous le disions au début de ce texte, n'est pas future mais actuelle, vivante, effrayante.
En ce sens, le problème de la révolution, n'est pas le problème de tel ou tel "parti", de telle ou telle secte, de tel ou tel groupe social, mis celui de l'ensemble du prolétariat, de l'humanité dans sa totalité.
Face à la barbarie du monde capitaliste, face à l'exacerbation de la crise, face aux attaques chaque fois plus systématiques à l'encontre de la classe ouvrière et de ses conditions de vie et de lutte, face à la guerre, le prolétariat s'est toujours soulevé et nous ne doutons pas qu'il le fera plus fort encore dans un futur proche.
On ne peut pas dire qu'au cours de ces dernières années il n'y ait pas eu de luttes prolétariennes. Il y en eut beaucoup. Dans certains cas, en Irak, en Birmanie, en Algérie, au Venezuela, à Los Angeles, etc, elles furent très radicales et s'affrontèrent aux centres du pouvoir du capital et de son Etat sans se laisser encadrer par les syndicalistes et les partis de l'ordre. Mais le grand problème actuel, c'est que ces révoltes, ces manifestations, ces protestations, ces grèves,... n'ont aucune continuité, n'ont pas de direction, ne se relient pas internationalement.
On ne peut pas dire qu'il n'y a pas eu de grandes explosions de rage prolétarienne et elles étaient bienvenues; mais nous devons reconnaître qu'elles ont manqué d'organisation et que pour cette raison, dans de nombreux cas, elles furent facilement défaites, ce qui permit à la terreur d'Etat de se remettre aisément en place au lendemain même de ces explosions.
On ne peut pas dire que les prolétaires, au cours de telles révoltes prolétariennes, ne reconnaissent pas leurs intérêts puisqu'ils ont pu par exemple, s'opposer à la guerre impérialiste, déserter, s'insubordonner, tuer des officiers qui les envoyaient à la guerre et exécuter des centaines de policiers et autres agents de l'ordre, comme en Irak; mais, faute de structures et de directives internationales et internationalistes, ces révoltes ont pu être isolées et partiellement encadrées par les forces bourgeoises nationalistes, ce qui suppose une défaite des camarades internationalistes.
On ne peut pas dire non plus qu'ils ne savent pas à qui ils s'affrontent parce qu'en général, au travers de ces révoltes, les prolétaires attaquent la propriété privée et ses défenseurs et ils s'approprient ce dont ils ont besoin; le grand problème est que deux jours plus tard, les barricades défaites, on retourne à la triste survie quotidienne où chacun s'arrange comme il peut et où le mode de vie du Capital prédomine à nouveau.
On ne peut pas dire qu'ils n'ont pas affronté les agents de l'Etat, les policiers, les curés et autres religieux, les dirigeants de la gauche et de la droite du Capital, les syndicalistes et les journalistes, puisque c'est contre eux que cette rage prolétarienne s'est déchargée en premier lieu; mais il faut bien admettre que la majorité de cette faune capitaliste dort encore tranquillement pendant que nos camarades laissent leur peau sur les champs de bataille et dorment dans des cachots.
La disproportion est énorme entre d'une part, la catastrophe de la société, le potentiel d'explosion du prolétariat et, d'autre part, l'absence de structures élémentaires de notre classe, ces structures qui nous conduiraient non pas à la reproduction de 10, 100, 1000 révoltes... mais bien à une révolution sociale internationale.
Nous manquons d'associationnisme ouvrier, de structures internationales de contact, d'organisations, de directives, d'une conscience de classe des objectifs, de capacités à coordonner, de décider en fonction des intérêts de l'ensemble du mouvement, de transformer les intérêts internationaux communs en actions convergentes et coïncidant dans le temps...; en résumé nous manquons plus que jamais de la structuration de la communauté de lutte réelle, de sa constitution en force organisée, en Parti communiste internationaliste.
Le Capital lui-même ne laisse pas d'autre choix au prolétariat, à l'humanité.
"L'ordre capitaliste ne peut ni répondre,
ni solutionner les questions du prolétariat et celles-ci ne peuvent
être postposées. Aujourd'hui, le réformisme est considéré
comme une utopie et a sombré dans le ridicule. La survie du système
exige le massacre de millions de personnes. Mais la survie de celles-ci
signifie le suicide des exploiteurs capitalistes. Ainsi, donc, pour les
révolutionnaires, étant données toutes les conditions
qui poussent la lutte des classes du réformisme à la révolution,
cette crise doit être la crise mortelle du système."
Paul Mattick, "La crise mortelle du capitalisme", 1933 |
D'aucun nieront l'embarras de la bourgeoisie face à l'écroulement du syndicalisme, d'autres resteront sceptiques face à une telle affirmation.
Mais que dire alors des dernières initiatives prises par certains bourgeois en France:
"Claude Bébéar, le patron du groupe d'assurance AXA à mis les pieds dans le plat en distribuant à son personnel un 'chèque syndical' que les ouvriers pouvaient uniquement donner à l'organisation syndicale de leur choix."La réponse des ouvriers ne se fit pas attendre:
"De l'indifférence, on passe à l'hostilité: plus de la moitié des salariés d'AXA ont choisi de jeter leur chèque à la poubelle plutôt que d'en faire bénéficier une organisation."A l'occasion de cet encouragement patronal aux ouvriers pour qu'ils soutiennent les syndicats, les syndicalistes ont demandé un peu de discrétion dans l'aide qui leur était apportée par le patronat. Il ne fallait pas, en effet, que le remède soit pire que le mal et participe un peu plus à la décrédibilisation générale et accélérée de cette structure bourgeoise.
Le journal donne à cette occasion quelques exemples et autres conseils aux patrons pour les aider à soutenir le syndicalisme:
"Bien sûr, bon nombre de grandes firmes contribue à faire vivre les centrales, par exemple en achetant des espaces publicitaires dans leurs journaux ou en entretenant des permanents." (encore une fois, ce n'est pas nous qui disons cela, c'est "L'Expansion" qui donne cet exemple apparemment bien connu des bourgeois!)"L'Expansion" reprend également l'avertissement de Bernard Brunhes, ex-conseiller de Pierre Mauroy:
"Toute aide trop voyante de la part des employeurs risquerait donc d'amoindrir encore leur crédibilité."Si cela a toujours été un moment important de l'écrasement du prolétariat que de lui faire prendre les victoires de son ennemi historique comme ses propres victoires et de lui présenter les organisations de son ennemi comme ses propres organisations, il est clair qu'aujourd'hui, les syndicalistes et quelques bourgeois radicaux de gauche ou d'extrême-gauche se retrouvent de plus en plus seuls à prendre encore les vessies de la bourgeoisie pour les lanternes de la révolution. Partout, les syndicats sont décrédibilisés; la baisse d'adhérents est de plus en plus générale. "L'Expansion" (sacré journal!) commente tout cela:
"On comprend que les centrales, qui au début des années '80 étaient très demandeuses de scrutins pour asseoir leur légitimité (élections prud'hommales, sécurité sociale), soient beaucoup moins pressées aujourd'hui devant l'évidence de la baisse de leur audience (...); le nombre des délégués syndicaux dans les entreprises privées, de l'ordre de 400.000, est à peine inférieur à celui des adhérents, évalué à 500.000."Autant dire qu'il ne reste en France, dans ces organisations que les délégués, leurs intimes et quelques indécrottables crédules.
Mais finalement de quoi la bourgeoisie a-t-elle peur? "L'Expansion", plein de prévenance pour ses lecteurs, sans aucun doute amenés à prendre de grandes décisions dans le futur, nous le rappelle en citant Michel Kirch, directeur général de Bostitch, qui parle des délégués de la CGT et de la CFDT:
"Mais eux, au moins, ont l'expérience de la négociation (autant dire qu'ils savent 'être raisonnables' - NDR) et constituent un facteur de stabilité."Et plus loin:
"Les patrons (et toute la bourgeoisie derrière eux - NDR) ne craignent rien tant que les actions inorganisées, les mécontentements non canalisés."Non, nous n'exagérons rien, c'est écrit TEL QUEL.
Evidemment, lorsque la bourgeoisie nous dit "non canalisés", nous entendons: non canalisés vers les intérêts de cette société de mort. Lorsqu'elle parle "d'inorganisés", nous entendons: "qui refusent de se faire organiser par une fraction bourgeoise". Bref, nous savons que la bourgeoisie exprime à travers l'utilisation de ces expressions, sa crainte de voir des prolétaires révolutionnaires faire surgir, dans et par leur lutte, leur propre organisation de classe, en dehors et contre les syndicats et l'ensemble de l'Etat bourgeois.
Mais voici encore une déclaration lucide quant à l'importance des syndicats du point de vue bourgeois. Ici, c'est Raymond Soubie, ex-conseiller "social" de Chirac et Barre, qui parle:
"Un gouvernement --comme d'ailleurs un employeur intelligent-- devrait se préoccuper d'avantage de renforcer les intermédiaires syndicaux responsables plutôt que de se réjouir de leur désarroi... Il y a de moins en moins de grèves... Il y en aura de plus en plus... de spontanées, non maîtrisées. Du fait de la faiblesse des syndicats, les entreprises sont exposées à des coups de grisou... sans que le système d'alarme préalable ait fonctionné, et sans qu'ensuite les syndicats puissent s'engager au nom des salariés, sur un compromis..."Mais laissons maintenant la parole aux chefs syndicalistes, beaucoup plus explicites quant à eux, sur leur rôle réel. Ainsi s'exprime Nicole Netat, secrétaire générale adjoint de la CFDT, à propos des candidatures de délégués syndicaux:("L'école libératrice", organe du SNI - 9/1/1988).
"Il est trop facile pour les employeurs de susciter des candidatures et d'avoir en face d'eux des interlocuteurs dociles. Or, c'est contraire à l'intérêt de l'entreprise. D'abord parce que ce faux consensus cache les tensions réelles, qui peuvent éclater sans signe annonciateur et sans contrôle."Voila qui est parlé clairement: les délégués ne doivent pas apparaître comme des "interlocuteurs dociles". Pour réellement s'entendre avec l'employeur sur l'essentiel, à savoir l'intérêt de l'entreprise, qui est d'abord de pouvoir prévoir et contrôler les explosions de colère ouvrière, il est préférable qu'ils aient une allure quelque peu "combative".
On ne saurait dire mieux. Il s'agit bien d'avoir une pseudo-opposition entre syndicat et patronat, pour organiser des mascarades de luttes préventives, histoire d'essayer de désamorcer les vraies luttes. Le problème étant que cela marche de moins en moins.
Evidemment "L'Expansion" nous présente tout cela comme une nouveauté, alors que la nature contre-révolutionnaire des syndicats est dénoncée par les communistes depuis tellement longtemps (1) et que le seul paradoxe réel... c'est qu'il reste encore des ouvriers pour appeler "organisations ouvrières" ce que tout le monde --y compris les bourgeois-- reconnaît comme étant des organisations étatiques au seul service de l'ordre et de la civilisation.
Evidemment, les syndicats sont les premiers à empêcher la publicité des compliments que leurs font les patrons. Citons une dernière fois "L'Expansion":
"Le PDG d'Usinor-Salicor a tenu à inscrire dans un accord la clause suivante: 'L'exercice d'un mandat syndical est un élément valorisant pour le déroulement d'une carrière professionnelle'. Les syndicalistes signataires ont tiqué devant cette phrase et obtenu qu'elle ne figure pas dans le dépliant distribué au personnel..."
Une des raisons du maintien de ce contrôle est un certain respect, même s'il est de moins en moins puissant, du syndicat par les ouvriers. Cette croyance quasi religieuse dans les syndicats vient du fait qu'ils bénéficient encore un peu d'une image "ouvrière" dans la mesure où toute l'histoire (bourgeoise évidemment) nous raconte qu'il a fallu imposer l'existence des syndicats par la force, qu'ils sont le produit des sacrifices ouvriers et que "ce n'est pas parce qu'aujourd'hui quelques bonzes font ceci ou cela qu'il faut abandonner cette arme de lutte". La bourgeoisie a eu (et conserve) la capacité de faire identifier au prolétariat et aux luttes de notre classe, la racaille qui contribue à les détruire. Elle a réussi à faire associer les syndicats à nos luttes historiques.
Mais les syndicats ne sont pas plus à même d'empêcher les luttes ouvrières que les curés, même si les deux en sont les ennemis jurés. La force des syndicats, c'est leur présence dans les entreprises, le "copinage" des délégués qui travaillent avec les ouvriers, qui les connaissent, qui vont boire le coup avec eux et qui savent ainsi comment "prendre" chacun, comment le "ramener à la raison", comment "lui faire prendre conscience de ses intérêts véritables", comment lui expliquer pourquoi telle mesure anti-ouvrière n'est pas si mauvaise (ou est un moindre mal), comment et pourquoi arrêter la grève qui "n'est plus populaire".
Ce copinage en fait les meilleurs flics en civil qui soient. Présents quotidiennement sur les lieux et confrontés aux développements des mouvements, ils connaissent "les fortes têtes", les "têtes brûlées", les meneurs. C'est ce qui leur permet soit de les soumettre à la répression de leurs propres services d'ordres, des gros bras aux corps-francs, des coups jusqu'aux exécutions, soit de les dénoncer aux autres services d'ordres plus officiels, pour que ceux-ci, dont ils reconnaissent la compétence supérieure, puissent les emprisonner, les torturer, les exécuter. Entre ces deux méthodes, le développement de leurs responsabilités dans les entreprises leur offre quelques autres possibilités, comme de faire mettre ces "agitateurs" aux postes les plus pénibles, leur faire sauter les primes, les mettre en tête sur les listes de licenciements, sur les listes noires.
A travers tout cela, par l'habitude, l'idéologie et la violence, les syndicats gardent un rôle dans la lutte anti-ouvrière; mais leur discrédit actuel rend ce rôle moins important que dans le passé et ils risquent de ne pas résister durablement à une vague de lutte un tant soit peu importante. Gérer la paix sociale pour qu'elle perdure, et affronter le prolétariat en lutte, sont deux choses bien différentes.
Cependant il ne faut pas se faire d'illusion, la bourgeoisie est loin d'être à court de possibilités. Dès que les luttes ouvrières se développent, la bourgeoisie développe ses réponses à celles-ci.
Face à un développement des luttes ouvrière, il est évident que les syndicats, ou des parties de ceux-ci, vont se radicaliser. Certains vont critiquer les "bonzes", dénoncer les magouilles, rompre avec eux d'un point de vue formel, voire même les affronter physiquement. Mais tout cela ne se fera que pour mieux reproduire l'ensemble, c'est-à-dire le syndicalisme. Les organisations contre-révolutionnaires, pas plus le syndicat que l'église ou l'armée, ne peuvent être critiquées et transformées, elles doivent être détruites de fond en comble.
D'un autre côté, différents délégués de base de la gauche ou de l'extrême-gauche bourgeoise vont se radicaliser plus encore, et essayer de créer, à l'image des organisations révolutionnaires spontanées du prolétariat, de nouveaux syndicats plus "radicaux". On en voit fleurir ces derniers temps, des coordinations, des fédérations, des syndicats autonomes etc... etc... Toutes ces organisations se donnent une image radicale pour mieux défendre la totalité bourgeoise. On les reconnaît à ce qu'elles défendent les valeurs de toujours, celles défendues par les syndicats traditionnels et par les églises: la défense de l'outil et celle de la raison, la défense du travail et de la soumission, la défense de la patrie et de la région... La force de ces "nouvelles" organisations syndicales consiste notamment dans la polarisation qui est rendue possible avec les anciennes organisations.
Mais lorsque la révolution se développe, lorsque la critique communiste balaye toutes les idéologies sur son passage, ainsi que toutes les pratiques bourgeoises, lorsque le prolétariat s'organise en force, en classe, en Parti, la révolution détruit alors également les organisations contre-révolutionnaires, les syndicats.
Et si les organisations ouvrières expriment quant à elles dans un premier temps, les faiblesses d'une classe qui sort de la contre-révolution et en porte donc tous les stigmates, le développement de la lutte et la radicalisation continue de la critique pratique et théorique révolutionnaire qui ira toujours plus à la racine des choses, emportera avec elle ces faiblesses. Ainsi, grâce à l'activité des communistes agissant comme fraction, les organisations ouvrières vivront une crise organisationnelle qui mènera le plus souvent à l'existence de deux organisations rapidement séparées par les deux côtés de la barricade.
Dans ce mouvement historique, les organisations syndicales et leurs petites soeurs plus ou moins radicales, deviendront les cibles des armes de la critique, et de la critique par les armes du prolétariat.
Ces précisions et répétions, nous aurions aimé et espéré qu'elles ne soient pas indispensables, mais la triste réalité contre-révolutionnaire internationale, les discussions dans ce coin-là avec des camarades de lutte de la première heure, nous ont rendu à l'évidence contraire: oui, plus que jamais, il est indispensable de dénoncer ces ravalements de façades, ces pseudo-changements pour ce qu'ils sont en réalité (cf. l'Editorial de cette même revue).
Hier, c'était les Sandinistes qui se transformaient en flics, en administrateurs de l'Etat, renforçant par là la fonction qu'ils avaient assumé sous le règne de Somoza: celle de la destruction de toute autonomie de classe. Aujourd'hui, alors que le Front Farabundo Marti pour la Libération Nationale (FMLN) assure la gestion d'un ensemble de gouvernements municipaux, une grande partie des ex-militants de ce Front, une fois leurs armes remises aux représentants exemplaires du terrorisme Etatique international que sont la police Vénézuélienne ou à la Garde Civile espagnole (!), demandent à intégrer les rangs de la police nationale civile: 20% des candidats à l'Académie de la Sécurité Publique sont constitués d'anciens combattants du FMLN.
C'est également toute la politique de défense de la propriété privée qu'on consolide en essayant de liquider, par ces accords, une des formes de vie que le prolétariat avait imposé durant tant d'années de guerre: la réappropriation violente de tout ce dont il avait besoin. Aujourd'hui, une des principales campagnes du FMLN s'articule autour de la "lutte contre la délinquance". Le Front lance des appels massifs à la délation, à la dénonciation de tout type de "délinquance", autrement dit, il tente ainsi de mobiliser l'ensemble de la population dans la collaboration policière et la défense de la propriété privée des moyens de vie.
Et on assiste, --comme toujours et partout-- au "replâtrage" du sanguinaire Etat démocratique salvadorien. Une nouvelle couche de peinture "démocratique" est ainsi appliquée sur les vieux appareils répressifs, qui se voient recrédébilisés définitivement par la présence des "militants populaires" du Front Farabundo Marti de Libération Nationale. Officiellement, on prétend évidemment avoir dissout les vieux appareils répressifs, et on souligne que la "nouvelle" police (1) a pour objectif la "défense des Droits de l'Homme", même si ce mensonge, tout juste bon "pour l'exportation", est quotidiennement démenti. Au Salvador, personne ne doute de la continuité de ces corps répressifs, pas même le gouvernement actuel qui n'a pu nier que les nouveaux corps répressifs aient été formés en mettant aux postes clés les anciens assassins et tortionnaires (officiellement, quelque 20% de la nouvelle police civile est constituée de membres des corps de répression traditionnels, mais tout le monde sait que leur poids effectif est qualitativement bien supérieur).
Et comme si tout cela ne suffisait pas, les dirigeants de cette formation politique, aujourd'hui décisive dans la reconstitution et l'unification du pouvoir bourgeois, tente à tout prix de conserver quelque crédibilité face aux masses désillusionnées, en se plaignant de ce que le gouvernement ne respecte pas telle ou telle partie de l'accord, par exemple, pour ce qui concerne les remises de terre. Comme si ces accords de paix, patronnés par les gouvernements de toute la région et des différentes puissances impérialistes, avaient un autre objectif que celui du rétablissement du même vieil ordre social pourri d'exploitation, de misère et d'oppression existant dans ce pays!
Action directe et |
Internationalisme ! |
Le 7 mars 1991 fut une des journées culminantes d'un long processus insurrectionnel au cours duquel le prolétariat s'était exprimé contre la guerre et contre toutes les forces bourgeoises de la région: police secrète baasiste, garde républicaine, nationalistes, gouvernements communaux locaux, religieux... Cette lutte indiquait ainsi aux prolétaires du monde entier la seule voie à suivre pour éliminer à jamais les guerres.
Depuis lors, la bourgeoisie internationale a tout fait pour réprimer ce mouvement. Les nationalistes, les démocrates de toutes tendances, les organisations humanitaires, l'ONU et les Baasistes, les pacifistes, les religieux de tous bords,... se sont partagés le travail pour nous réprimer. Tandis que les uns s'attelaient au désarmement et à l'embrigadement de prolétaires dans les milices nationalistes, les autres dénonçaient l'internationalisme et travaillaient à la réorganisation locale de l'Etat en organisant des élections. Un autre volet de l'action visant à notre écrasement fut, sans nul doute, le black out complet opéré par les médias internationaux à propos de la situation sociale en Irak.
Nous avons longuement développé dans nos différentes revues centrales la description de cette insurrection et le compte-rendu de mouvements similaires qui se sont déroulés dans d'autres régions d'Irak. Pour une analyse détaillée, nous renvoyons le lecteur francophone aux numéros 33 ("Guerre ou révolution"), 34 ("Défaitisme révolutionnaire en Irak") et 36 ("Prolétariat contre nationalisme") de la revue Communisme (ex-Le Communiste). On trouvera aussi d'autres informations concernant cette question dans les encadrés de ce texte.
Le processus insurrectionnel en Irak a commencé à se concrétiser entre le 26 et le 28 février 1991, par l'existence à Bassorah et dans une série de villages avoisinants, de milliers de déserteurs armés déambulant dans les rues, ainsi que par la perte du contrôle de la situation de la part des appareils centraux de l'Etat. Le 4 mars, dans cette même ville, un saut de qualité est donné dans ce processus lorsque des colonnes de tanks en retraite du Koweit, tirent contre les symboles du régime. L'insurrection se généralise alors dans cette ville. Le même jour, à Bagdad, dans plusieurs quartiers ouvriers se produisent des affrontements. Ce sont ces quartiers qui seront bombardés par les Alliés au même moment. Le 4, le 5 et le 6 mars, l'insurrection se généralise dans les villes suivantes: Nasivya, Aamara, Najaf, Karbala, Hila, Koot,... L'insurrection à Rania, le 5 mars, marque le point de généralisation de l'insurrection vers les autres régions d'Irak. Le 7 mars, le prolétariat armé détruit un des bastions les plus importants du régime à Soulaymania. Le 8 mars, c'est au tour de la ville de Kadar, le 9 mars l'insurrection se développe à Koya, le 10 à Shatlana. Le 11 mars, c'est à Arbil que le prolétariat se soulève et le lendemain, c'est toute la région qui est aux mains des prolétaires. Le 13 mars, les derniers résistants baasistes tombent à Akra, le 14 à Duwok et le 15 mars à Zakho. Les 16 et 17 mars, à partir de toutes ces villes où le prolétariat triomphe, des colonnes entières de combattants se proposent de libérer la ville de Kirkouk; mais l'aviation des forces baasistes rend cette tâche très difficile. L'insurrection paye ici un tribut de milliers de morts. Malgré cela des grandes batailles sont encore livrées et des casernes entières sont prises par l'insurrection, tel par exemple le commandement de la région militaire pour tout le Kurdistan, près de Soulaymania. Enfin, entre le 19 et le 21, l'insurrection triomphe à Kirkouk, mais cette ville retombera aux mains des baasistes quelques jours plus tard.
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Cette affiche signée "Des prolétaires Internationalistes" et que nous reproduisons à la fin de ce texte, rappelle que le nationalisme, le patriotisme, le pacifisme, le parlementarisme et aujourd'hui plus spécifiquement encore, l'"humanitarisme" international dirigé entre autre par l'ONU, ne sont rien d'autre que les armes universelles de répression du prolétariat.
L'affiche a été réalisée dans différentes langues (anglais, espagnol, français, kurde, allemand,...) par des camarades du GCI de différents pays, ainsi que par d'autres groupes proches et différents contacts. Elle a été placardée avec la collaboration de différents contacts et groupes de prolétaires sur les murs de villes d'Angleterre, de France, d'Allemagne, d'Espagne, de Belgique, d'Irak,... Au moment où nous clôturons l'édition de cette revue, nous sommes toujours dans l'attende de nouvelles de ce qui aurait pu être réalisé dans d'autres endroits. "En marge de cette initiative", pour utiliser les propres termes d'une autre affiche ("Cette affiche a été réalisée en marge d'une initiative internationale de plusieurs groupes réunis sous la signature ponctuelle: DES PROLÉTAIRES INTERNATIONALISTES"), une action similaire a été entreprise et réalisée au Québec, mais pour laquelle les camarades ont malheureusement tenu à apparaître sous leur propre nom, plutôt que sous celle de la signature commune internationale. Nous expliquons plus bas l'importance que nous voyons aujourd'hui à nous affirmer comme communauté, plutôt que comme addition de groupes.
Nous voudrions brièvement insister, à l'occasion de cette action, sur la profonde signification que contient la présence et l'action de la coalition des forces bourgeoises internationales aujourd'hui en Irak: malgré leurs intérêts différents, lorsqu'il s'agit de défendre l'ordre bourgeois fortement ébranlé, elles sont capables d'une unité d'action exemplaire. Nous voudrions également souligner que face à cela, face au capital, l'affirmation de notre propre terrain de lutte, l'internationalisme, n'est pas un choix parmi d'autres, ni un adjectif accolé à une action locale, mais une question de vie ou de mort pour notre mouvement.
C'est dans ce cadre que nous insistons fréquemment sur l'être mondial que constitue le prolétariat: nous formons une et une seule classe internationale et notre ennemi est le même partout. Toute la force de la bourgeoisie consiste précisément à nier l'universalité des conditions de lutte du prolétariat.
Mais la négation du caractère mondial du prolétariat n'est pas seulement "théorique", elle se concrétise avec force et se structure matériellement dans la façon dont la bourgeoisie impose elle-même le terrain qui lui convient le mieux pour écraser le prolétariat, c'est-à-dire quand elle parvient non seulement à faire "oublier" au prolétariat qu'il forme une seule classe, mais aussi et surtout quand, ayant élu le terrain d'affrontement qui lui sied le mieux, elle réussit à dicter le cadre de la guerre qu'elle nous livre: la force unifiée internationalement dans son camp contre l'action isolée de notre classe, circonscrite à telle ou telle région.
Pour parvenir à imposer ce terrain, son terrain, pour réussir à isoler les prolétaires pays par pays, la bourgeoisie procède de diverses manières: répression de toute liaison directe entre des prolétaires de pays différents, campagne de falsification visant à minimiser ou salir les luttes pour isoler localement le prolétariat, blocus, terreur blanche,... La politique bourgeoise pour le prolétariat, la politique typiquement social-démocrate, se concrétise plus particulièrement sur cette question par l'encadrement du prolétariat de chaque pays dans le sens d'une transformation de l'action "internationale" de celui-ci en une action de procuration, de médiation, de pétitions, de "solidarité" par chèques et télégrammes. La Social-Démocratie a toujours à disposition "sa" proposition d'"internationalisme" pour empêcher la lutte du prolétariat sur place contre "son propre" Etat.
Expliquons-nous au regard de l'histoire.
La vague de lutte de 1917-1923 a été caractérisée par une généralisation inégalée du développement révolutionnaire: de l'Asie à l'Europe, de l'Amérique Latine aux Indes, le mouvement révolutionnaire a bousculé les frontières nationales et sur cette base retentissait partout l'appel à la nécessaire organisation internationale du prolétariat. L'Internationale Communiste constitua sans nul doute une tentative de réponse à la volonté de la bourgeoisie d'isoler le prolétariat en Russie. Cette réponse partielle se concrétisa entre autres par différents sabotages et actions internationalistes contre les armées envoyées pour mener la guerre aux prolétaires insurgés en Russie. La constitution de l'Internationale Communiste et son Manifeste en 1919 eurent comme écho profond la généralisation du mouvement insurrectionnel international (Allemagne, Hongrie, Bavière, Autriche, Portugal, Brésil,...) où le prolétariat assuma la guerre révolutionnaire contre "son propre état", "sa propre bourgeoisie". Malgré cela, l'Internationale Communiste (en faisant abstraction ici de la responsabilité historique des Bolcheviks et du rapport de force international) ne constitua malheureusement pas une véritable rupture avec la conception social-démocrate de fédération en partis nationaux. Chaque parti communiste national (à quelques exceptions près, le KAPD en Allemagne notamment) resta la plupart du temps déterminé par les contingences des points de vue dictant les luttes qui se déroulaient "nationalement", faiblesse qui ouvrit la possibilité pour la bourgeoisie de freiner puis détruire la révolution. Paquet par paquet, nation par nation, les forces internationales de la bourgeoisie purent imposer la guerre de leurs forces coalisées. La force de la bourgeoisie a ainsi résidé dans sa capacité à imposer le terrain sur lequel elle est historiquement la plus forte: celui d'une lutte menée dans le cadre d'une nation, où le rapport de force s'établit entre la prolétariat local, d'une part, et les forces bourgeoises internationales, de l'autre. Et c'est précisément quand le prolétariat fit preuve d'internationalisme, quand notre classe parvint à structurer une réponse commune et internationale dans la guerre sociale, que la bourgeoisie se sentit la plus faible. Il en fut ainsi des actions par lesquelles le prolétariat international soutint l'insurrection d'Octobre 1917 en Russie, brisant le blocus de l'information bourgeoise, prolongeant le défaitisme révolutionnaire à tous les camps et arrêtant la guerre, assumant différents niveaux d'actions directes ensuite.
D'autre part, il faut bien se rendre compte dans tout ce contexte, des immenses difficultés qu'a rencontrées le prolétariat insurgé au Mexique ou en Russie par exemple, pour communiquer au delà des frontières, l'information de ce qui était en train de se dérouler. Dans le monde entier, les insurrections prolétariennes mexicaine (1910-1914) et russe (1917-1919) étaient partout présentées comme de simples insurrections populaires anti-dictatoriales. Pour cela, la Social-Démocratie avait une théorie toute prête, celle des pays arriérés, celle de la nécessité dans ces pays d'une révolution bourgeoise, ou/et celle de la révolution "prolétarienne" développant les tâches démocratiques bourgeoises. Cette idéologie a non seulement amené à ce que des pseudo-anarchistes et autres social-démocrates en arrivent à nier le caractère prolétarien de l'insurrection au Mexique, et à ce que la Social-Démocratie parvienne à cacher le caractère prolétarien de l'insurrection en Russie, mais aussi à ce que des organisations en rupture avec la Seconde et la Troisième Internationale, comme par exemple la KAI, en arrivent à sombrer dans la plus profonde confusion face à cette question.
Si nous illustrons ce que nous venons de décrire et que nous appliquons tout cela à propos des enjeux de la lutte qui se déroule aujourd'hui en Irak, nous voyons que l'intérêt de la bourgeoisie est de se présenter avec l'ensemble de ses forces internationales (nationalistes kurdes, forces de la Coalition, ONU, organisations humanitaires, religieux,...) confrontée à une action de notre classe strictement limitée à cette seule région, à une classe défaite et non homogène.
Toute notre action à nous -en nous affirmant comme prolétariat mondial-, doit précisément viser à rompre le cercle de feu par lequel la bourgeoisie tente d'isoler notre lutte en Irak. Toute notre énergie doit viser à prolonger l'action directe que nous menons dans cette région par l'action directe dans le reste du monde. Nous devons briser l'isolement, briser la possibilité bourgeoise d'isoler une minorité d'entre nous et empêcher qu'on nous réprime dans l'indifférence de nos frères de classe dans le monde.
Nous devons pour cela, et plus que jamais, affirmer notre lutte en Irak comme un moment de la lutte du prolétariat mondial. Nous devons nous revendiquer, nous affirmer comme un seul corps, comme une seule classe, unie dans les conditions de vie qui nous sont internationalement imposées et, plus encore, dans la lutte mondiale que nous menons pour abolir notre condition.
Et malheureusement, même autour de nous, et avec des camarades qui se disent d'accord avec nos positions, nous n'avons pu que constater de gigantesques incompréhensions sur toute cette question.
Ainsi, face à la proposition ponctuelle qu'a représenté le fait de réaliser une affiche en commun, nous nous sommes heurtés à des incompréhensions de tout type.
Il y eut des résistances de type organisatif, des résistances propres à l'époque sectaire que nous traversons, et qui se concrétisèrent par des réticences de tout ordre à signer l'affiche avec notre groupe ou à considérer comme incorrect le fait que nous assumions en tant que groupe, notre propre responsabilité en signant l'affiche.
Il y eut également des doutes par rapport aux informations données par nos camarades. Certains contacts demandèrent des preuves (!?) de ce que nous affirmions, d'autres nièrent purement et simplement le caractère insurrectionnel des explosions prolétariennes qui se sont déroulées en Irak, ou n'acceptèrent l'information... que lorsque la presse bourgeoise la relaya partiellement. Au delà de grandes déclarations de principe, on trouve ici une expression de la soumission à l'Etat: les informations données par les medias bourgeois sont plus vite acceptées que celles transmises, avec les difficultés qu'on imagine, par notre réseau militant.
Il y eut aussi des incompréhensions par rapport à la tâche elle même, vue comme une action isolée. Il est impossible de comprendre le sens de cette initiative internationale sans la resituer dans le cadre d'une action de plus dans notre affirmation de l'action internationaliste, dans l'affirmation de notre communauté de lutte et, plus concrètement, de notre organisation de l'action communiste internationale.
Il y eut encore, des incompréhension par rapport à la tâche elle-même qui fut trop souvent ramenée à une action de "solidarité" "d'ici avec là-bas" (en prenant le point de vue des autres régions que celles du Moyen Orient); ou à l'inverse, en tant qu'appel "d'ici -en Irak- pour que là-bas -ailleurs- on se solidarise avec nous", alors qu'il s'agit en réalité d'une action du prolétariat international "ici" et "là-bas", contre les ennemis d'"ici" et de "là-bas".
Et finalement, comme sous-produit de l'incompréhension antérieure, cette action prolétarienne et communiste fut encore comprise comme une médiation, réduite en une simple campagne publicitaire pour tel ou tel groupe de prolétaires, et non plus en tant qu'une action de contre-attaque face à l'action concertée de la bourgeoisie mondiale visant à isoler une fraction régionale de notre classe pour mieux l'écraser.
En général, nous nous sommes donc affrontés à une conception parlementaire et fédéraliste de l'unité prolétarienne, où ces contacts, au lieu de pousser à l'unité d'action internationale, insistaient sur leur particularisme, sur la nécessité que chaque groupe ou individus consultés sur les différents mots d'ordre ou signatures,... sans se rendre compte que cette conception est celle du congressisme et du conférencialisme propre à la Social-Démocratie, qu'elle s'oppose pratiquement à la communauté de lutte, qu'accepter ces critères conduit à mille médiations paralysantes qui transformeraient la communauté de lutte en un Parlement (1).
Les élections pour un parlement national kurde ont constitué un moment décisif de l'action de la bourgeoisie mondiale contre notre classe. A ce moment, aucun recours à la provocation et à la falsification de la part de nos ennemis n'a fait défaut. Les médias du Kurdistan et du reste de l'Irak ont tout fait pour développer auprès des prolétaires, la confusion entre les positions communistes internationalistes et les positions nationalistes. Le point culminant de ces campagnes a sans doute été l'annonce, faite par les différentes radios nationalistes -et plusieurs fois par jour- d'un appel à la participation électorale que notre organisation, le Groupe Communiste Internationaliste aurait lancé au Kurdistan, et cela malgré que notre action dans la region ait été menée dès le debut, contre tous le nationalistes, et contre tous les parlaments. Une fois de plus, nous insistons ici sur le fait que les bases mêmes de constitution de notre organisation sont invariablement contre la démocratie et la nation et que toute personne ou groupuscule qui citera notre groupe dans le cadre de n'importe quel processus électoral ou/et de reconstitution nationale, agit directement contre nos bases programmatiques. Dans le meilleur des cas, il s'agit d'une erreur ou d'une falsification de nos positions; dans la plupart des cas, il ne peut s'agir que d'une provocation montée a partir du Ministère de l'Interieur ou de la Défense Nationale.
D'un côté, nos camarades en Irak affirment que leur force est notre force et que ce qui empêche aujourd'hui les forces coalisées de la contre-révolution de transformer la réorganisation locale de l'Etat en offensive ouverte, est précisément le fait de notre force internationale. Plus concrètement encore, ils nous disent que ce qui empêche nos ennemis directs (les nationalistes de toutes tendances au Kurdistan) de passer à l'attaque systématique de nos camarades, est liée à l'action que le GCI et d'autres groupes internationalistes mènent en Europe et sur d'autres continents, parce que cela rend les nationalistes plus vulnérables.
D'un autre côté, et au même moment, en Europe et dans les pays du continent Américain où nous essayons de mener directement ce type d'action, des camarades proches nous répondent qu'ils ne voient pas l'importance de ce type d'action; qu'ils se méfient de l'information que nous donnons; qu'ils seraient d'accord, mais qu'ils veulent signer d'une autre façon; qu'ils sont d'accord avec tel mot d'ordre mais que tel autre leur pose des problèmes; que ce type d'action est de la pure propagande et que dans les circonstances actuelles cela ne sert à rien parce qu'à l'époque actuelle le prolétariat d'"ici" ne s'intéresse pas à ce qui se passe "loin", etc...
Bref, au même moment où nos camarades insistent pour continuer la pression que nous tentons de soutenir face aux nationalistes, nous nous trouvons confrontés à dix mille prétextes sectaires, anti-organisatifs et individualistes qui malgré eux, contribuent à l'objectif de nos ennemis: isoler les secteurs d'avant-garde du prolétariat mondial et réprimer nos camarades.
Avec nos très faibles moyens, nous avons lutté pour assurer une meilleure centralisation des différentes structures dans la région. Face au manque total de communication auquel nous sommes soumis en Irak (la poste internationale ne fonctionne pas, le téléphone non plus), nous avons réalisé d'importants efforts pour trouver d'autres voies de communication interne internationale.
D'autre part, au développement de la revue centrale en Arabe et à la publication de nos thèses d'orientation programmatique dans cette même langue, nous avons décidé d'ajouter (en tenant compte de l'énorme importance internationale des événements vécus dans la région et de l'intérêt exceptionnel que le prolétariat de cette même région porte à nos positions) la publication d'une nouvelle revue centrale du groupe qui devra paraître prochainement en langue Kurde. Dans la mesure du possible, nous publierons également une revue locale en Kurde, avec la collaboration d'autres groupes de prolétaires, revue qui aura comme titre "Le prolétaire internationaliste".
C'est dans ce même ordre d'idée qu'il faut comprendre l'action engagée par des militants dans divers pays autour de l'impression et du collage de l'affiche reproduite ici, action pour laquelle il ne s'agissait pas de se "solidariser avec" les prolétaires en Irak, mais bien d'agir ensemble pour affirmer la même lutte, les mêmes intérêts, la même communauté, la même force, de façon à ce que la bourgeoisie soit dans l'impossibilité de nous réprimer "paquet par paquet".
Il nous semble important de faire cette différence entre ce que peut signifier d'une part, la fausse solidarité comprise comme une médiation spectaculaire reliant fictivement des ouvriers de différents pays et, d'autre part, la solidarité agissante, résultant de la lutte commune.
Coller une affiche sur les murs peut constituer une manifestation du parlementarisme ou, tout au contraire, faire partie d'une action directe du prolétariat, du communisme, contre le Capital. Tout cela dépend de sa conception et de la manière dont, tant pour le fond que dans la forme, elle fait partie ou non, de l'activité communiste mondiale.
Pour nous, communistes d'Irak, d'Angleterre, d'Espagne, d'Allemagne, de Belgique, de France, d'Amérique du Nord et du Sud, ou d'ailleurs encore, tel que nous l'avons conçu, cet affichage est beaucoup plus qu'un affichage. C'est une manifestation ponctuelle et modeste de la force mondiale que le prolétariat est en train de structurer et qui, dans son effort pour ne pas se présenter disséminée nationalement ou linguistiquement, dans sa tentative -encore très faible- pour apparaître au même moment dans différentes langues et dans différents endroits du globe, oblige l'adversaire social à combattre sur un terrain moins sécurisant que celui qu'il impose habituellement. Rien de mieux, en effet, pour les organisations nationalistes, humanitaires et religieuses que de s'occuper de "chaque prolétariat" (c'est comme ça que la bourgeoisie le comprend!) en fonction de "son" petit drapeau national.
C'est en forçant toujours plus la bourgeoisie à combattre sur les sables mouvants que constituent pour elle l'activité directement internationale du prolétariat que nous empêcherons l'écrasement de notre lutte en Irak et que nous préparerons les luttes de demain.
Il ne s'agit donc pas de lancer des appels platoniques au soutien universel, il s'agit de contre-attaquer politiquement, avec l'aide de tous les secteurs d'avant-garde prolétarienne et des militants de différentes latitudes, la bourgeoisie internationale et sa tentative de liquider, par l'humanisme et le nationalisme, quelques uns de nos meilleurs camarades. Il s'agit par dessus tout, de casser l'isolement et l'oubli qu'on tente d'imposer sur une des plus importantes tentatives d'affirmation de notre classe dans le monde actuellement.
Le défaitisme dominant se combine aujourd'hui avec le programme historique de la social-démocratie, pour nier l'importance d'une telle démarche. La clé de la politique social-démocrate sur cette question précise s'appuie sur la réalité d'un faible niveau de conscience quant à l'existence de notre classe comme classe mondiale pour liquider la possibilité de toute action directe et diviser le prolétariat en arguant des "situations objectivement différentes dans chaque pays" pour justifier l'impossibilité d'assumer une action "ici et maintenant". Il s'agit de réduire le prolétariat au silence en lui imposant l'entremise de la bourgeoisie, en l'obligeant à recourir aux médiations et intermédiaires bourgeois (l'inaction, en réalité) et de lui expliquer que ce qu'il fait "ici" n'a rien de commun avec ce qui se fait "là-bas" et que la seule chose à faire est de passer par les canaux communs offerts par la société pour se "solidariser": "faire une affiche ici sur la situation là-bas", "faire une affiche ici pour les gens d'ici", envoyer une lettre de protestation, une délégation, un peu d'argent,...
L'opposition historique entre parlementarisme et action directe se joue à ce niveau.
Le camp du parlementarisme et de la démocratie vise à médiatiser au maximum son action, à séparer les instances de décision et d'action, à séparer la théorie de la pratique, à conseiller aux prolétaires de chaque pays d'organiser des actions de "solidarité" par procuration...
Le camp de l'action directe et du communisme cherche à assumer violemment l'action directe contre son ennemi, non pas dans le sens ici (pour ce qui concerne l'affiche internationale dont nous parlons) d'une violence immédiate, mais dans le sens de l'affirmation de la lutte sur notre propre terrain: celui de la confrontation directement internationale, celui de l'affirmation -insupportable pour la bourgeoisie- de notre être commun.
Quand des prolétaires d'une dizaine de pays agissent conjointement (malgré toutes les limites actuelles) et qu'ils planifient une action pour la mener ensemble (et si possible en même temps) contre le même ennemi, face à la même indifférence, pour les mêmes intérêts et avec les mêmes objectifs... ils font effectivement violence à la bourgeoisie.
Nous sommes conscients du tragique décalage existant aujourd'hui entre les agressions que subit notre classe un peu partout dans le monde et les difficultés de réaction à ces attaques. En ce sens, nous savons bien que cette action commune ne constitue qu'un minimum au regard de l'immensité des tâches à accomplir. Il est clair qu'il faudra bien plus que cette initiative à contre-courant pour défaire le système de mort qui nous étouffe.
Malgré cela, et dans le cadre de l'absence tragique de structures de centralisation internationale du prolétariat, il nous a semblé important de souligner le fait que quelques camarades originaires de différents horizons et vivant en différents endroits du globe aient pris aujourd'hui l'initiative de se centraliser à contre-courant de l'anti-organisationnalisme et du sectarisme dominant, et aient pu ainsi vivre, en agissant comme un seul corps, un moment de la nécessaire "Union Grandissante" du prolétariat en vue de l'abolition définitive de ce monde de mort.
Aujourd'hui, plus que jamais, c'est bien de cette communauté d'assumation pratique de l'action directe internationale dont nous avons besoin, et dont les liens qui se forgent dans l'activité commune constituent un moment. C'est d'ailleurs à partir de ces mêmes liens, qui contredisent le sectarisme et l'individualisme ambiant, que naîtront demain les germes d'une organisation communiste internationale du prolétariat à même de défaire à tout jamais l'inhumaine barbarie à laquelle nous sommes soumis.
Hier, 7 mars 1991, l'insurrection prolétarienne en Irak contre la guerre et contre toutes les forces capitalistes, montre au prolétariat du monde entier la seule voie à suivre pour éliminer à jamais les guerres.Comme toujours, de l'autre côté de la barricade, toutes les forces mondiales du Capital agissent comme un seul corps pour liquider l'autonomie de notre classe.
Aujourd'hui, 7 mars 1993: les nationalistes, les démocrates, les organisations humanitaires, les pacifistes continuent à se mobiliser pour nous écraser en Irak, en Yougoslavie, en Somalie, au Salvador,...
Aide internationale = désarmement et répression du prolétariat !
Nationalistes kurdes = Baasistes = O.N.U.
Etre patriote, c'est être assassin !
Contre le parlement kurde, contre le Capital et tous ses Etats !
Pour la révolution sociale mondiale !
Notre camarade avait commencé à militer avec nous sur base d'une rupture radicale avec la toxicomanie. Son intégration à notre groupe a d'ailleurs coïncidé avec l'arrêt total de prise de came. Voici ce qu'il en disait:
"(...) La toxicomanie est l'une des multiples expressions possibles de réaction et de positionnement social face à la frustration du Capital, au même titre que la folie, la délinquance ou la téléphagie. C'est une révolte inconsciente qui stigmatise le refus du système dans les chairs de la victime. Mais c'est surtout le triomphe de la puissance de récupération du Capital: la société des toxicomanes est l'exacerbation presque absolue du modèle capitaliste. La toxicomanie, c'est le triomphe de l'individualisme et de l'anti-solidarité (chacun pour soi, chacun sa came), le triomphe de l'aliénation (l'aliénation concrète de la dépendance à un produit), le triomphe de la réification (corps/objet que l'on suicide, que l'on vend pour la came), le triomphe du palliatif (came sinon souffrance), le triomphe de la marchandise (valeur d'échange et valeur d'usage, même dénominateur: la came pour la survie), le triomphe de la valeur (quelques billets pour quelques milligrammes de poudre et de plaisir), etc... La toxicomanie, c'est le système de la survie immédiate institutionnalisée, autrement dit le système capitaliste..."Peu de temps avant d'écrire ces lignes, il avait appris qu'il avait le sida.
Il est impossible de décrire ici les luttes de tous les jours que cette nouvelle engendra: affrontement permanent avec les médecins, récupération violente de dossiers médicaux constitués sur lui, critique radicale de l'alimentation (notre camarade définissait l'alimentation capitaliste comme une tentative d'empoisonnement généralisée), virulentes et vaines démarches pour obtenir quelques renseignements sur les possibilités dont font publicité les vautours médicaux "alternatifs", autant pourris par l'intérêt financier que leurs confrères "officiels", lutte contre l'idéologie de l'anti-plaisir, refus de crever à l'hôpital, bataille permanente pour ne pas accepter --malgré toutes les pressions (1)-- le poison AZT que le commerce médical avait ressorti, refus d'expériences visant à le transformer en cobaye,...
Chacun de ces moments, nous les avons vécus ensemble, comme frères de combats, avec tout l'acharnement et la passion pour cette seule "vraie vie" que constitue aujourd'hui pour nous la critique militante de l'Etat. Nous avons discuté et choisi en pleine connaissance de cause, l'orientation et la direction à donner pour chacun des moments de cette lutte permanente. C'est ce qui fait que notre camarade n'est pas mort malade. Il est mort en luttant. Il est mort en vivant, à l'opposé de cette majorité d'"êtres" morts-vivants qui peuplent aujourd'hui l'espace capitaliste de paix sociale, et dont l'unique réalité se laisse dicter par le monstre d'argent qui les domine.
C'est de tous ces moments qu'est rythmé le texte que nous publions ici. La plupart des réflexions qui s'y trouvent tout autant que le point de vue communiste qui l'anime est indissolublement uni aux innombrables actions et discussions que nous avons menées ensemble.
C'est pourquoi ce texte n'est pas dédié à notre camarade. Ce texte EST notre camarade. Nos ruptures communes avec le monde de mort actuel s'y retrouvent pleinement. Voici comment il les avaient formulées:
"(...) Le contexte de notre lutte est paradoxe, est contradiction. 'Nous nous armons pour abolir les armes'. Nous survivons pour abolir la survie,... et enfin vivre. Cette contradiction, il nous faut l'assumer, la traverser, si nous voulons un jour lointain vivre... Pour sortir de ma 'folie', arrivé à une impasse, j'avais deux solutions: choisir de lutter ou choisir de ne pas lutter. J'ai choisi."
"Pour toi, camarade, qui aurait placé dans ton propre cercueil, l'enregistrement des Sex Pistols hurlant "No Future!". Pour toi, camarade, dont les veines ont été inondées d'un pur produit mortel que des tortionnaires appelés "médecins" ont créé.Pour toi, que le Progrès a lentement assassiné et qui est mort en luttant. Pour notre haine commune de la Science et de l'Etat, et avec toi, camarade, nous continuons à nous battre!..."
Avec les armes nucléaires et chimiques, les compteurs à gaz, les prisons sensorielles et les QHS, la cortisone et l'huile frelatée, les coffres de banque, les saignées et les antibiotiques, la chaise électrique et la chirurgie esthétique, la télévision, les parcmètres électroniques et les électrochocs, les avions A-10, les hélicoptères Apaches et les missiles Patriotes... le sida a donc ainsi fait sa brillante apparition parmi les produits de la Science et les enfants du Progrès!
En francs matérialistes, nous allons simplement exposer quelques éléments du contexte social et économique dans lequel se débattent la Science et la Médecine, pour comprendre que le rétrovirus du sida a toutes les "raisons" (commerciales et/ou "accidentelles") d'apparaître... au moment où les conditions sont réunies pour le créer! Il ne s'agit pas ici de tonner quelques nouvelles sensationnelles à son propos, mais de rompre avec la langue de bois scientifique et démocratique qui prévaut sur ces questions.
Il n'est pas possible d'envisager la mystérieuse apparition du sida, pas plus qu'il n'est possible de concevoir les raisons des efforts désespérés des scientifiques et de leurs médias pour en dissimuler l'origine, si l'on ne saisit pas en quoi la Valeur détermine intimement la Connaissance, si l'on ne voit pas la stricte dictature qu'exerce l'Argent sur la Science, si l'on ne prend pas en compte la collusion totale entre Science et Argent (2), si l'on ne comprend pas l'unité profonde entre la recherche pharmaceutique et la nécessité commerciale, si l'on ne saisit pas l'indissociable lien qui unit le domaine militaire, les politiciens et le monde de l'Economie.
Nous entamerons donc ce texte par un court avertissement visant à éclaircir le point de vue à partir duquel nous nous situons.
Notre point de départ n'est pas celui d'une "bonne" science que nous opposerions à une science "décadente", "mauvaise" ou "corrompue". La Science, comme connaissance subsumée par la valorisation capitaliste, est pourrie dans son essence même. Comme toute autre force productive du Capital, c'est jusque dans ses fondements que la Science est inhumaine: dans ses fondements et pas seulement dans ses applications.
Il n'y a pas de bonne utilisation possible de la Science, pas plus qu'il n'y a de bonne utilisation possible de la Police, par exemple. Nous n'avons pas plus de "reproches" à faire à la Police qu'à la Science. Notre critique ne porte pas sur la "bavure" (policière ou scientifique), elle ne porte pas sur le fait de concevoir scientifiquement ou d'utiliser policièrement une matraque qui produit des décharges électriques,... Notre critique pratique et théorique porte sur l'existence même d'une force organisée et armée pour la défense de la Propriété bourgeoise. Notre critique porte sur l'essence même d'une connaissance dont l'horizon borné est constitué de la nécessité d'accumuler des capitaux. La Science, tout comme la Police, ne doit pas être réformée mais détruite.
En nous excusant de nous répéter dans cette introduction sur le caractère irrécupérable de la Science du point de vue du communisme, du point de vue des besoins véritablement humains, nous préciserons encore --par souci d'être bien compris-- qu'en entamant cette critique des bêtises proférées autour des origines du sida, nous nous dissocions totalement d'une critique qui se bornerait à dénoncer les "excès" de la Science (comme les bourgeois de gauche dénoncent les "excès" de la Police). La dictature historique de la Valeur sur l'Humanité s'est exercée à ce point sur les efforts des hommes pour développer la connaissance, que ce sont les paradigmes mêmes de la Science qui sont entièrement pourris. Des concepts aussi fondamentaux et sacrés (soi-disant neutres) que la "matière", les "atomes", les "quartz",... sont strictement déterminés par l'argent, l'horizon borné du scientifique, cet esclave de la recherche (d'argent!) et du développement (capitaliste!), étant lui-même marqué dans tous ses aspects par la dictature du taux de profit.
Nous n'entendons donc pas proposer une contre-thèse scientifique. Et si nous reprenons ponctuellement tel ou tel argument scientifique pour l'opposer à un autre, c'est parce que de notre point de vue -celui de la destruction de la science de mort capitaliste- il peut parfois lever un voile sur la réalité de l'iceberg marchand et guerrier qui se cache derrière la "partie visible" que constituent les tonnes d'écrits justifiant l'activité scientifique (3). Notre analyse n'est donc ni scientifique, ni "objective", au sens bourgeois; elle découle par contre, de la réalité même du rapport social existant réellement. C'est sur cette base que nous affirmons que le sida est objectivement une marchandise dont la valeur est inappréciable pour le Capital. Et c'est contre notre utilisation comme "chair à médicament", comme cobayes salariés que nous voulons lutter.
Mais plongeons donc dans l'enfer scientifique! La Vieille Taupe est là qui creuse... Suivons-là!
L'imbécillité médicale est encore incapable aujourd'hui de simplement désigner l'origine réelle des maux dont nous souffrons (l'alimentation détraquée que nous permet notre salaire, par exemple, la pollution généralisée ou la torture qu'est le Travail!), mais cela n'empêche pas ces assassins au ton docte de s'entourer des plus prestigieux diplômes et autres bimbeloteries propres à convaincre la canaille citoyenne de se laisser palper par eux.
Mais au mensonge "passif" que constitue le mur de leur vocabulaire et de leur cérémonie répondent leurs mensonges actifs. Pour protéger la Science, il faut mentir, imposer ces mensonges comme vérité, comme dogme, et réprimer ceux qui ne les acceptent pas.
La Science est un pouvoir: celui de l'Etat! C'est la connaissance mise au service de la Valeur. Aux ordres de la bourgeoisie, la Science sert son savoir: elle aide la classe dominante dans sa recherche à imposer l'ordre marchand. Les applications scientifiques sont ainsi avant tout commerciales et guerrières. La Science est un monstrueux commerce. Pour l'imposer, il faut mentir!
Galilée a été considéré comme hérétique par la majorité de ses collègues, parce qu'en se ralliant à Copernic pour expliquer que la Terre tournait autour du soleil, il mettait à nu, déjà à cette époque, l'ignorance et la bêtise institutionnalisée que représentait la Science, invalidant ainsi des années d'Université et d'apprentissage du Savoir (4). On lui imposa le mensonge en le faisant se rétracter devant l'Inquisition en 1633. Mais il a moins souffert que les millions d'hérétiques prolétariens qui depuis des siècles tentent de fuir le Travail en le dénonçant comme une torture, et à qui le con sens populaire et la Science font chanter "Le travail, c'est la santé..." ou encore, "Arbeit macht frei"!
Rien n'a changé depuis l'époque où ces charlatans imposaient ces mensonges! Rien n'a changé depuis l'époque où la médecine officielle préconisait les saignées pour guérir des fièvres (5)!
Aujourd'hui, le tableau n'est pas moins sombre!
On nous propose les bombes atomiques de l'"anti-vie" (les anti-biotiques) pour nous rendre rapidement aptes à retourner au travail.
L'auteur de ces lignes, trop naïf à l'époque, a souffert l'injection de doses quotidiennes de ce violent poison qu'est la cortisone... pour soigner la petite dépression des 20 ans.
Pour "guérir" la toux des enfants, on préconise des calmants (des somnifères en fait) sous forme de sirop (bonne nuit et bon travail demain, les parents!).
La pilule contraceptive, cette juteuse entreprise commerciale, est une véritable concentration de poisons provoquant non seulement des cancers du sein et de l'utérus chez celle qui la prend, mais aussi des malformations de l'appareil génital auprès de sa descendance féminine.
Etc... Etc...
Et on ne parle pas ici des "erreurs" médicales, des outils chirurgicaux oubliés dans l'estomac, de la confusion dans l'amputation d'un membre, ou d'inversion de dossiers, mais bien de l'école officielle de médecine, de ce que chaque apprenti-tortionnaire reçoit comme ordres de ses supérieurs pour calmer, pardon! --soigner-- ses patients (ils ont eu l'hypocrisie d'appeler "patients" (6), les victimes qui leurs tombent entre les mains!).
Non! Rien n'a changé dans le monde du mensonge et de la Science! Les plus grands médecins qui, pour les soigner, saignaient leurs malades, étaient protégés et payés par les plus hautes institutions de l'Etat. Rien ne pouvait remettre leur Savoir et leur Pouvoir en question. Aujourd'hui, l'Etat démocratique finance, pour se défendre (contre l'absentéisme, la baisse de rendement humain, la subversion,...), les idéologies et mensonges de ces milliers d'assassins scientifiques empanachés du blanc rédempteur, et qui nous bombardent à longueur d'années, de somnifères pour abrutir le temps consacré à refaire notre force de travail, d'excitants pour réveiller notre travail, d'hormones pour engraisser les cochonneries à bas prix qui nous sustentent, de dopants pour battre nos "concurrents",... La Science, c'est la Barbarie du Capital!
Quelques exemples:
En 1981, alors que l'on commence à faire état d'une épidémie étrange et inconnue jusqu'alors, on tâche de l'attribuer à ceux qui semblent en être plus particulièrement les victimes, à ce moment: les homosexuels. De là vont surgir les délires, aujourd'hui enfouis sous de nouveaux diagnostics, mais dont il est bon de se rappeler qu'ils émanaient des mêmes idiots qui nous "rassurent" aujourd'hui. Ainsi, une des hypothèses argumentait "l'effet immunosuppresseur du sperme administré par voie rectale". En termes clairs: ces scientifiques attribuaient la disparition des défenses naturelles de l'homme au doux plaisir de s'enculer! Merci, la morale!
En 1985, des scientiflics construisent un impressionnant échafaudage de liens à partir d'un virus qu'ils attribuent au singe vert africain. Celui-ci aurait mystérieusement (?!) contaminé des africains de l'Ouest, provoquant ainsi une légère mutation du virus l'amenant, après deux étapes supplémentaires, à donner naissance au virus du sida, responsable de l'épidémie. Nous n'allons pas redonner ici la logique imbécile des expériences en laboratoire qui les avaient amenés à cette conclusion, puisqu'en 1988, démasqués, ils étaient forcés d'avouer qu'il y avait eu contamination en laboratoire, et que le premier virus dont ils étaient partis pour remonter l'histoire originelle... était lui-même le produit direct de leurs manipulations criminelles. Bravo, la biologie (7)!
En 1985, encore, pour tenter d'éloigner la date de naissance du sida des années où les conditions matérielles étaient réunies pour le fabriquer en laboratoire (dès 1971!), les scientifiques américains "prouvèrent" la présence d'anticorps du sida dans plus de 50% des échantillons de sang cryoconservés et prélevés au Kenya et en Ouganda, de 1959 à 1970. Balancés à grands cris dans tous les journaux du monde, ces progrès de la recherche étaient démentis sans publicité quelques mois plus tard: les tests n'étaient pas fiables et de nouveaux tests avaient prouvé l'absence totale d'anticorps du sida dans ces mêmes échantillons! Vive la Science!
Pour éloigner plus encore le spectre de l'origine scientifique de l'apparition du sida, il fallait non seulement déconnecter les dates d'apparition de la maladie de l'époque à laquelle il était possible de fabriquer le rétrovirus, mais il convenait également de brouiller géographiquement l'éventuel berceau dont il était issu (8). Il est raisonnable de penser que cette monstruosité scientifique est plutôt issue des centres historiques mondiaux d'accumulation de la connaissance scientifique (USA, Europe, Amérique Latine,...), et c'est pourquoi sans doute, ces mêmes centres de recherche cherchèrent (comme par hasard!) à en éloigner l'apparition originelle: le péché ne pouvait provenir que d'Afrique ou d'Haïti!
Ainsi, en 1982, le CDC (Center for Desease Control) d'Atlanta, organisme regroupant toutes les informations épidémiologiques et médicales aux Etats-Unis qui, par ses rapports et consignes, oriente les médecins du monde entier, le CDC donc, définit les Haïtiens comme un groupe à haut risque. Pour argumenter son verdict, le CDC argue du fait que les Haïtiens atteints du sida ne présentent aucun autre facteur d'identification "classique" (toxicomanie par injection intraveineuse, homosexualité, hémophilie). Comment en sont-ils arrivés à semblable conclusion? Simplement parce que les malades haïtiens, interrogés aux Etats-Unis, ont "déclaré" aux médecins qu'ils n'étaient ni homosexuels, ni toxicomanes. Quand on connaît le tabou que constitue la prostitution homosexuelle, tant aux USA qu'à Haïti, quand on considère la sévérité de la répression de l'Office de l'Immigration aux Etats-Unis, quand on subit les questionnaires médicaux (de véritables interrogatoires de l'Etat), quand on connaît les condamnations de tout ordre qu'implique l'aveu de toxicomanie,... bref lorsque l'on saisit la précarité d'une vie immédiate ne tenant plus qu'au fragile fil qui la relie aux décisions de la Médecine, de la Justice et de l'Office de l'Immigration, on comprend que, sur les 34 prolétaires émigrés de Haïti atteints du sida, seuls quatre d'entre eux aient avoué l'origine de leur "crime"!
Sur cette base, le CDC dénoncera les Haïtiens à la vindicte de l'opinion publique. Il faudra ensuite trois années pour que le CDC se rétracte et retire les Haïtiens de la catégorie des populations à haut risque mais, aujourd'hui encore, ils restent interdits comme donneurs de sang!
Ce dernier exemple est intéressant en ce qu'il montre que l'occultation grossière à laquelle recourt la bourgeoisie n'est jamais le simple et machiavélique résultat de quelques méchants manipulateurs. Tous les mensonges partent d'un faisceau de vérités partielles qui, utilisées en tant que parties et pour répondre à un besoin de la classe dominante, ont pour fonction d'occulter la totalité (c'est l'arbre qui cache la forêt!), et s'imposent ainsi comme distorsions de la réalité sous forme d'idéologies.
En définissant les Haïtiens comme groupe à haut risque, les scientifiques partent d'une base matérielle (les peurs de ces prolétaires immigrés face à l'Etat, peurs concrétisées par leur refus d'avouer leur homosexualité ou leur toxicomanie) pour conclure statistiquement ("c'est scientifique"!, crient-ils quand ils ont des chiffres) qu'il y a proportionnellement plus de haïtiens que d'américains atteints du sida!
La condamnation des Haïtiens assume ainsi une fonction (exorciser la peur de millions d'américains) et répond à un besoin: permettre la continuité du développement sans entraves de la Science (et donc de la Valeur!). Ainsi, pour protéger la Médecine et le Progrès (indispensables aux mouvements désordonnés du Capital), l'Etat se doit d'imposer des "vérités" (des idéologies!) faisant écran entre les inquiétudes des hommes et les horreurs de la réalité.
Mais ces "écrans", ces idéologies constituent une force matérielle qui permet au Capital de prolonger son inévitable agonie: ces idioties balancées à force d'émissions scientifiques peuplées de déclaration convaincues, débitées lentement par de hauts responsables du "Monde" médical, posant leur voix bien bas pour s'imposer face au profane, font s'émerveiller le peuple imbécile face à la Science, de la même manière qu'on l'agenouille devant le Pape ou Gorbatchev!
Le paradis --chrétien ou "socialiste"-- n'a comme base d'argumentation que l'eau bénite du pape ou les cigares de Castro, et dès qu'on confronte leur description paradisiaque de la Démocratie aux millions de sans abris, aux millions de chômeurs, aux 40.000 enfants qui meurent de faim chaque jour, bref quand on oppose l'argumentation à la prosaïque réalité, il ne reste rien!
Et pourtant, tous ces mensonges cimentent l'opinion publique et transforment chaque être humain en schizophrène, en un être séparé de lui-même, sublimant sa souffrance jusqu'à la défendre comme son véritable bonheur (9).
Pour revenir à notre sujet, lorsqu'on entend le vide de l'argumentation concernant les origines du sida, on pourrait se dire que tout de même cette fois-ci, il y a peu de chances pour que quelqu'un tombe dans le panneau! Faux! La bêtise des argumentations n'empêche en rien les médias de l'imposer!
Ainsi, pour éloigner la date d'apparition du sida de l'époque à laquelle les conditions matérielles étaient réunies pour le fabriquer en laboratoire, les chercheurs (de mensonges!) ont tout simplement "découvert" quelques cas de sida au beau milieu des années cinquante et soixante, en Afrique. Mais bien vite, il est apparu que les tests ayant déterminé la présence d'anticorps au virus mortel dans ces vieilles éprouvettes n'étaient pas valables (cfr plus haut). On a alors décidé de tout simplement confirmer, corroborer malgré tout ces diagnostics rétroactifs... sur base d'une simple et vague ressemblance des seuls symptômes décrits dans les dossiers de ces malades dont on avait tiré le sang!!! Pour prouver la vérité de ses propos, quoi de mieux que de l'inventer?
De la même manière, au milieu des années 80, les justifications invoquées pour diriger les recherches de cas de sida antérieurs à 1970, vers l'Afrique et non vers les Etats-Unis (10), se basaient sur le fait qu'il était tout simplement impensable qu'une telle maladie ait pu passer inaperçue dans ce centre du Progrès et de la Science que constitue les USA! C'est tout!
Quelque soit la part de bêtise, d'ignorance, de mensonge, de machiavélisme, de défense d'intérêts, de concurrence... qui déterminent ces médecins et autres scientifiques à prolonger leur monstrueuse création laborantine par de tout aussi monstrueux mensonges quant à l'origine de ce virus, ce qui leur est commun est le point de vue de classe borné qui les détermine à se soumettre aux lois de l'Etat, à la dictature de l'expansion commerciale et au progrès capitaliste!
Le racisme qui sous-tend les idéologies prônant l'apparition originelle du sida en Afrique ou à Haïti n'est que le prolongement de la puissance dominante de ce géant de l'Economie (et donc de la Science et du Progrès) que constituent les Etats-Unis. Mais le racisme étant une composante du Capital lui-même, il n'est pas l'apanage des seuls bourgeois américains: toutes les nations sont racistes et participent d'une manière ou d'une autre à ces campagnes qui consistent à dénoncer le "voisin" en se servant du sida pour renforcer l'union nationale. Ce fait n'est pas nouveau: de tous temps, les bourgeois se sont servis de la maladie pour alimenter le caractère raciste de l'Etat, et ressourcer l'Union Nationale derrière la bannière protectrice.
Quelques années avant 1500, alors qu'une épidémie de Syphilis déferle sur l'Europe, chaque nation ira chercher le bouc émissaire de la maladie auprès des "étrangers". Les russes en accusèrent les polonais, les anglais et les turcs l'appelèrent le "Mal français", les français l'appelèrent la maladie italienne et les italiens, la "Maladie espagnole",...
Tout montre et démontre que le sida apparaît au moment où les conditions matérielles sont tout simplement réunies pour créer de tels virus, mais l'opinion publique, ce réceptacle de l'idéologie dominante, vulgarise les histoires des scientifiques, et fait ainsi efficacement écran à ce qui se présente comme des paranoïas des ennemis de la Science. Tout s'arrange! Le monde peut continuer à tourner et la marchandise à circuler! "L'origine du sida", m'explique ma concierge, "se résume à un bien mystérieux virus trouvé chez les singes verts en Afrique et qui, parce qu'un nègre a sans doute enculé un singe, s'est transformé en épidémie mortelle. La débauche (prostitution, homosexualité et toxicomanie) a parachevé l'oeuvre de ces sauvages en répandant le virus sur toute la planète"!
"La technologie nécessaire à faire de nouveaux rétrovirus pouvant affecter l'homme à partir de ceux qui étaient déjà connus comme cancérigènes ou comme aptes à causer immunodéficiences ou maladies du cerveau chez d'autres mammifères, cette technologie était déjà bien développée et largement publiée au début des années '70. Beaucoup de scientifiques qui dirigent maintenant la recherche sur le sida ont travaillé dans les laboratoires de cancérologie où cette technique était mise au point: Gallo, Essex, Haseltine (Etats-Unis); Weiss, Jarret (Grande Bretagne); Montagnier (France); Zhdanov, Lapin (URSS); Deinhardt (RFA), etc..."Cette citation n'a pas uniquement pour but de donner les noms de quelques-uns des assassins qui sont sans doute parvenus à composer les monstruosités dont il est question ici. Cette déclaration de John Seale, membre de l'Académie Royale de médecine de Grande Bretagne, extraite du "New Scientist" de janvier 1987, illustre entre mille autres, le fait qu'au début des années '70, la recherche en biologie moléculaire disposait des moyens pour fabriquer, créer, inventer de toutes pièces, des chimères rétrovirales capables de s'attaquer au système immunitaire de l'homme.
En 1969, parallèlement à la relance de la recherche en cancérologie, des scientifiques américains caractérisent la "Transcriptase Inverse". Pas de panique! Ce mot latin n'est rien d'autre que le nom mystérieux que les sorciers modernes ont trouvé pour qualifier une enzyme propre aux seuls rétrovirus et qui leur permet de traduire leur ARN en ADN, alors que jusqu'ici, la Science défendait avec acharnement que seul l'inverse était possible; cette enzyme est déterminante dans le développement des techniques de clonage moléculaire, c'est-à-dire aussi, de production de monstres génétiques. C'est ce que nous allons tenter d'expliquer.
Le dogme central de la biologie moléculaire était jusqu'alors qu'il était impossible (et donc hérétique!) d'imaginer traduire l'information des gènes d'ARN en ADN (12). Comme pour tout dogme scientifique, la réalité s'est empressée de lui faire un vigoureux pied de nez, et voici donc, avec cette "découverte" (13), que va s'ouvrir pour l'"humanité" médicale une simplification révolutionnaire de la possibilité d'adapter des rétrovirus spécifiques des tumeurs animales, par exemple,... à la cellule humaine!
On appelle "RETROVIRUS", les virus à ARN dont la spécificité réside précisément dans leur capacité à transcrire leur ARN en ADN, et de transmettre ensuite cet ADN à la cellule qui l'abritera. Cela signifie en clair, que la maîtrise de cette enzyme propre à tous les rétrovirus --la "Transcriptase Inverse"-- rendait techniquement réalisable la possibilité de faire persister le virus au sein du matériel génétique de la cellule (humaine ou animale) à laquelle on l'avait intégré, donnant ainsi un incroyable coup de pouce aux possibilités de manipulation et de clonage en biologie moléculaire, autant qu'elle ouvrait de juteuses perspectives commerciales.
Sans crainte de nous répéter, et pour bien faire comprendre l'ampleur et l'horreur des armes qui ont été ainsi mises dans les mains de ces cinglés sous patente légale que sont les biologistes, nous voulons insister ici sur le fait que la recherche autour de ces fameux rétrovirus n'est pas le simple résultat d'un "flash" particulier de tel ou tel scientifique, mais que la fascination qu'exerce la maîtrise de la "Transcriptase Inverse" est directement liée au fait qu'il devient vraiment facile de créer des chimères de toute sorte, et entre autres des rétrovirus, ce qui était techniquement impossible quelques années plus tôt. Avec la découverte de la capacité des rétrovirus à transcrire leur ARN en ADN, c'est tout un pan de nouvelles expériences de clonage qui s'annonçait. La matière première du biologiste moléculaire s'augmentait soudain d'une enzyme lui permettant de transcrire toute molécule ARN en ADN, et d'appliquer ainsi le clonage à toutes sortes de virus ARN, à toutes sortes de rétrovirus.
"En 1971, une confirmation éclatante du rôle de la Transcriptase Inverse est la mise en évidence d'un "ADN infectieux" (=capable d'infecter!) dans les cellules infectées par un rétrovirus. Introduit dans des cellules non-infectées, cet ADN était capable de reproduire le virus. Donc, il portait bien son information génétique."Il est dès lors possible, même maladroitement, de fabriquer des monstres génétiques en utilisant également des rétrovirus. Quelques années plus tard, entre 1979 et 1981 (le temps d'incubation du sida!), apparaissent les premiers cas d'une pneumonie d'un type très rare en Californie: il ne faudra plus longtemps aux terroristes en blouse blanche pour annoncer que ces symptômes sont le fait d'un original et nouveau rétrovirus, le seul rétrovirus connu s'étant jamais attaqué à l'homme! Le sida vient de faire son entrée dans l'horrible jardin de la Science... et son apparition coïncide totalement (nous ne le répéterons jamais assez!) avec la découverte de l'existence de rétrovirus, et la possibilité de les cloner.
Les industriels pharmaceutiques --véritables dictateurs, commanditaires et pourvoyeurs de capitaux de tout ce qui anime la recherche scientifique-- sont depuis des années activement à la recherche d'un moyen pour produire des substances humaines et animales (base de la marchandise-médicament) à moindre coût (pour le fabriquant, bien sur!). Comme tout capitaliste, le gestionnaire aux commandes d'une industrie pharmaceutique, cherche à produire des "médicaments" (14), non pas pour "soigner", mais pour accroître son capital. "La médecine est une putain, son maquereau, le pharmacien"!
Pour qu'un médicament soit rentable, il faut, comme pour toute marchandise, qu'une quantité de travail humain suffisamment élevée y soit cristallisée: le blanc d'oeuf, présenté comme médicament, intéresse peu l'industrie pharmaceutique (15)!!! D'un autre côté, il ne faut pas non plus que les coûts de production atteignent un tel niveau qu'il devienne prohibitif et inachetable. Si le capitaliste ne parvient pas à commercialiser son produit, cela ne l'intéresse pas non plus.
Mais un autre facteur déterminant dans la course au profit que se livrent les capitalistes entre eux est la recherche effrénée pour produire une même marchandise à moindre coût. Pour cela, l'industriel est de façon permanente à la recherche d'une découverte technologique (une nouvelle machine, une nouvelle technique,...) qui lui permettra de bouleverser les forces productives à l'oeuvre pour la production d'une marchandise donnée. En effet, si un capitaliste dispose d'une machine lui permettant de produire une même marchandise en un temps de travail humain réduit de moitié par rapport à celui nécessaire à son concurrent, il peut non seulement se permettre de "casser le marché" en le vendant légèrement moins cher et en attirant ainsi tous les acheteurs chez lui, mais il réalisera également et surtout une plus-value extraordinaire, parce que le marché mondial continuera à faire abstraction du temps de travail que ce capitaliste a besoin pour la production de cette marchandise, ce qui signifie que son laboratoire produira, durant chaque heure de travail, des marchandises équivalant sur le marché mondial à bien plus qu'une heure de travail, ou autrement dit, que l'heure de travail dans ce laboratoire produira beaucoup plus de valeur (et permettra une appropriation plus grande de plus-value) que dans les autres laboratoires,... et cela tout le temps qu'il faudra à ses concurrents pour disposer des mêmes avancées technologiques que lui!
C'est ainsi, par exemple, qu'il existe en pharmacie, un produit (pardon, un poison!) --l'interféron--, dont le coût de production est actuellement au moins aussi élevé que sa toxicité, et qui est présenté comme un traitement du cancer. L'acheteur paye quelques 150 dollars par jour et ne peut arrêter le traitement... que lorsque les effets toxiques deviennent plus terribles que son cancer! L'affaire est on ne peut plus rentable pour l'industrie pharmaceutique qui le ressort périodiquement de ses tiroirs (16).
Tant que l'ensemble des capitalistes produisant cette marchandise dispose de la même science et se trouve face aux mêmes difficultés pour produire les protéines qui sont à l'origine de ce médicament, rien ne bouge. Et à certains moments, rien n'a même intérêt à bouger, parce que cela rentrerait en contradiction trop flagrante avec le développement global de telle ou telle branche de l'économie (17). Mais aujourd'hui précisément, parce qu'on ne peut sans doute plus taire les multiples contradictions surgissant face au dogme ADN, et également parce que la concurrence l'exige, comme on vient de l'expliquer ci-dessus, les capitalistes qui produisaient l'interféron voient leurs forces productives entièrement bouleversées avec la découverte de la Transcriptase Inverse, et la capacité donc de traduire de l'ARN en ADN. Il est maintenant possible de produire en quantité de l'interféron, et les capitalistes pharmaceutiques jouent du coude pour placer les multiples applications que cette "découverte" permet (il n'y a pas que l'interféron, bien sûr!), et se mettre ainsi en position de bénéficier le premier de cette plus-value aussi extraordinaire que momentanée!
Décrivons brièvement et le plus simplement possible les difficultés que le capitaliste pharmaceutique rencontrait auparavant pour synthétiser des molécules biologiques.
Pour faire produire à des bactéries (organisme unicellulaire) des substances (des protéines, qui seront la substance active d'un médicament), il est nécessaire de greffer à cette bactérie, une partie du génome d'une cellule produisant normalement (mais en de faibles quantités!) cette protéine.
Le chercheur se heurte à plusieurs problèmes de taille, dont le plus important est la difficulté d'isoler la séquence d'ADN permettant la production de cette protéine. L'ADN est traduit en ARN (messager) et cet ARN (m) est ensuite lu pour produire la protéine. Or ici, le chercheur est en face d'un nombre astronomique de séquences différentes (chacune codant une protéine spécifique) parmi lesquelles, UNE SEULE séquence donnera le produit fini, la protéine désirée. Trouver une séquence de quelques dizaines d'informations sur des millions d'informations relève de la gageure!!!
C'est ici que la Transcriptase Inverse a donc apporté au capitaliste pharmaceutique, ce que la machine à vapeur a apporté à l'industriel. En effet, la Transcriptase Inverse est une enzyme d'origine virale (en provenance d'un rétrovirus) permettant la synthèse d'ADN au départ d'ARN. Or, l'ARN (m) permettant la synthèse d'une protéine est beaucoup plus facilement isolable que la séquence d'ADN dans le génome, puisque l'ARN (m) est produit en grande quantité en comparaison avec l'ADN qui ne comporte qu'une seule fois la séquence intéressante et, deuxièmement, dans la plus grande partie des cas, à un ARN (m) correspond une seule protéine.
Donc, notre capitaliste pharmaceutique qui pour produire une protéine en grande quantité devait trouver la séquence d'ADN correspondant à cette protéine, avec toutes les difficultés que cela implique, n'a plus besoin maintenant que d'isoler l'ARN (m) et faire agir la Transcriptase Inverse qui va se charger quant à elle, de traduire cet ARN (m) en ADN, directement utilisable lors d'un clonage sur une bactérie.
On voit donc ici en quoi la Transcriptase Inverse, en plus des délires manipulatoires qu'elle permet et dont nous avons parlé plus haut, est également un énorme enjeu financier, commercial et économique ("scientifique", disent les revues "spécialisées" dans l'euphémisme!), favorisant l'éclosion d'innombrables poisons qu'on nous vendra bientôt comme médicaments.
Dès 1971, dès que fut caractérisée l'activité spécifique de la Transcriptase Inverse, les cancérologues américains vont se lancer dans une recherche effrénée et traquer la fameuse enzyme auprès des patients qu'ils ont sous la main. En 1970, Robert Gallo, de l'Institut National de Cancer, à Bethesda, aux Etats-Unis, repère et isole la Transcriptase Inverse dans les globules blancs de patients atteints de leucémie. En 1971, Stuart Aronson modifie le rétrovirus spécifique de la tumeur chez la souris, étend son registre infectieux et l'adapte à la cellule humaine.
La même année, les scientifiques coupent le virus d'un macaque en deux, et veulent en accoler la moitié à une moitié d'un "mangeur de bactérie" appelé Lambda. Cette molécule devait être introduite dans la bactérie "E. Coli" qui fait partie de la flore intestinale de l'homme. On imagine les dégâts, si "par accident" cette molécule chimère venait à quitter le laboratoire et retourner à l'homme! Pour l'histoire officielle, certains scientifiques ennemis du Progrès, empêchèrent le projet d'aboutir. Mais ce n'était que pour mieux sauter! D'autres projets virent le jour, et ce qui est certain, c'est qu'en 1971, il était possible de fabriquer des puzzles génétiques. Armés de son scalpel (les enzymes de restriction), de ses enzymes de transfert ("Transcriptase", qui traduit l'ADN en ARN, et "Transcriptase Inverse", qui permet la transcription inverse), de ses microscopes électroniques, cet artiste d'un nouveau genre qu'est le biologiste moléculaire peut se lancer à l'assaut des virus, rétrovirus et autres bactéries, les sectionner, les assembler, les réassembler et enfin les tester sur des cellules foetales humaines (les plus chères) ou de singes.
En 1972, le Bulletin de l'Organisation Mondiale de la Santé, agence dépendant directement de l'Organisation des Nations Unies et donc principalement des USA, demande d'étudier les effets de certains virus sur les fonctions immunitaires et plus particulièrement, les effets de l'infection sur les lymphocytes T (18). Ceci ne constitue qu'un exemple supplémentaire permettant de se rendre compte que toutes ces manipulations autour des virus et rétrovirus, chimériques ou non, ne furent pas le fait d'alchimistes égarés du droit chemin, mais bien directement l'oeuvre des scientifiques les mieux formés (à nous empoisonner!) et sous la direction des plus hautes instances médicales mondiales.
Cela nous donne-t-il une idée suffisante des origines de ce Tchernobyl biologique multiplié par 1.000, auquel nous ont soumis les scientifiques? Non!
Cette même année 1972, l'expérimentation sur l'homme est annoncée à la 7ème conférence du National Cancer Institute:
"La biologie du cancer rend essentielle des études par approches observationnelles sur l'homme selon les mêmes techniques de sophistication qui caractérisent l'expérimentation sur l'animal", y explique le Dr John Higginson, directeur de l'agence internationale de recherche sur le cancer à Lyon. Qu'il soit clair que ces "techniques qui caractérisent l'expérimentation sur l'animal" incluent l'inoculation de la maladie! Et cette même année 1972, au "Jewish Chronic Disease Hospital" à Brooklyn, des tissus cancéreux ont été transplantés sur des hommes à leur insu." (19)En 1974, on "réussit" à greffer un gène dans un oeuf de souris à peine fécondé: le gène étranger sera désormais transmis héréditairement. On "réussit" également à faire pousser les deux virus du visna du mouton et de la leucémie bovine sur la cellule humaine.
Bref, on va s'arrêter là dans l'infinie description de ces recombinaisons génétiques, de ces greffes de gènes, de ces accouplements monstrueux de virus animaux avec des cellules humaines, de ces tests criminels et hasardeux sur les hommes,... et, pour nous éviter l'indigestion, nous allons maintenant voir comment les problèmes d'éthique soulevés par ces expériences, comment les angoisses morales, les débats entre "faucons" et "colombes" de la Science et du Progrès n'ont constitué qu'un pas de plus vers une expérimentation qui sera bientôt libre de toute contrainte! De la même manière que l'instauration d'une paix n'est qu'un moment nécessaire au déclenchement de la guerre, les conférences que les scientifiques organiseront pour savoir si tout cela ne comportait pas le danger d'introduire des saloperies dans le système héréditaire humain, constitueront le tremplin le plus efficace pour relancer la recherche, en la désentravant!
C'est ainsi qu'une conférence eut lieu à Asilomar au cours de laquelle ces hypocrites se posèrent la question des risques pris avec ces recombinaisons génétiques. Un moratoire d'un an fut décidé, mais lors de la seconde conférence d'Asilomar, une réglementation fut définie: il fallait protéger les savants, les techniciens et autres garçons de salle, ainsi que le genre humain! Tu parles! On mit des bottes, des gants, des casques; on définit différents niveaux de sécurité pour les laboratoires en fonction du danger des expériences... et tout le monde se relança dans le délire expérimental de la biologie moléculaire. L'éthique et la morale furent révisées pour encore et toujours mieux servir la demande commerciale et militaire. Les savants, ces ignorants du genre humain, dépendent financièrement des laboratoires, et les grands laboratoires parient aujourd'hui, tous, sur la biologie moléculaire. Donc, on fonce!
La demande en cellules humaines est devenue énorme. "Flow", "Microbiological of Walkerville" et la "C of Maryland" aux Etats-Unis sont les trois entreprises géantes de la fourniture pour laboratoire qui s'entre-déchirent et approvisionnent le marché. En sept ans, "Flow" importera à elle seule 12.000 paires de reins de Corée du Sud, vivisectés sur des enfants extraits prématurément par césarienne au troisième trimestre de la grossesse, très près de la naissance naturelle. "Flow" est une filiale de "General Research Corp." qui fait de la recherche stratégique avec le Pentagone, et dont le président admet que les organes ont été "achetés afin d'effectuer des cultures organiques pour la recherche médicale". "A Singapour et en Suisse", explique Georges Wald, un prix Nobel de médecine, peu suspect de sympathies pour les anti-progressistes que nous sommes, "on évalue à près de 80.000, le nombre des "produits d'avortements" importés chaque année par les Etats-Unis entre 1969 et 1978" (20).
Commercialement, avec ce "boom" en biologie moléculaire, la cellule humaine est devenue une excellente marchandise. Des entreprises se créent. La concurrence bat son plein et stimule la Science. Des sociétés se créent (Cetus, Genentech, Biogène,...) et axent dès lors particulièrement leurs activités sur les produits de recombinaisons génétiques. A leur tête se trouvent, à chaque fois, ceux qu'on nous présente comme les cerveaux de notre monde, les généticiens les plus fameux, les papes de la biologie moléculaire, les avant-gardistes de la recherche sur le cancer.
Le marché est porteur. Depuis la synthèse du premier gène en 1972, le secteur de l'électronique moléculaire a attiré les entreprises en informatique et constitué un enjeu industriel et stratégique. Pour ne parler que d'un de ses géants, IBM s'intéresse à la capacité de remplacer le silicium, une matière déterminante dans les capacités de stockage d'information, par le matériel organique que constituent les chaînes de protéines ou d'enzymes, les bactéries manipulées, les virus, etc...
Dès le début en effet, le marché des armes s'est intéressé à l'électronique moléculaire. Cette recherche est financée par d'énormes capitaux et les brevets se déposent les uns après les autres. Ces réalisations restent évidemment secrètes, mais toutes sortes d'applications sont testées et essayées. Les applications les plus dangereuses pour nous restent évidemment directement la propriété de l'Armée et une loi a été votée en 1969 pour que ce monopole ne subisse aucune exception.
Comme toutes les lois, l'amendement est présenté comme une défense du bien-être commun, mais donne en fait clairement la permission à ces assassins drapés dans les couleurs patriotiques, de fabriquer et tester l'efficacité des monstruosités génétiques qu'ils se plaisent à fabriquer:
"(...) Aucun des fonds accordés ne doit être utilisé pour des essais à l'air libre d'agents chimiques mortels ni de micro-organismes générateurs de maladies ou de toxines biologiques, (...), sauf si le ministère de la Défense, sous couvert du président des Etats-Unis, affirme que le test en question est nécessaire à la sécurité nationale."Dans toutes ces recherches, le rétrovirus tient l'affiche parce que, comme on l'a vu plus haut, il constitue --via la Transcriptase Inverse-- le vecteur essentiel et idéal par sa faculté à s'inscrire dans les génomes d'autrui. En 1969 déjà, les délégués du Pentagone avertissaient du sens de leurs recherches autour de ces "collages" de virus, pour les années suivantes:
"Au cours des cinq à dix années qui viennent, il sera probablement possible de fabriquer un nouveau germe infectieux qui pourrait différer de façon considérable de tous les micro-organismes pathogènes connus."Ils poursuivaient, devant la commission de crédit du Congrès:
"L'important avec ces germes, c'est qu'ils pourraient être réfractaires aux propriétés immunologiques et thérapeutiques dont nous dépendons pour nous maintenir relativement à l'abri des maladies infectieuses."Faut-il chercher plus loin l'origine de la bombe virale qui nous est tombée sur la gueule avec le sida? Et précisons là qu'il ne s'agit pas d'une déviation momentanée de l'une ou l'autre tendance plus machiavélique (21) au sein de l'Etat aux Etats-Unis. L'arme biologique est envisagée par l'Etat depuis des années, et le recrutement du rétrovirus date déjà de 1952, alors que les techniques ne permettaient pas encore de l'"arranger" et le refabriquer; à cette époque, à Ottawa, on envisagea d'utiliser l'agent de la fièvre aphteuse pour ruiner les troupeaux ennemis.
En 1976 et 1977, des enquêtes parlementaires eurent lieu aux Etats-Unis et révélèrent qu'un programme de recherches biologiques patronné par la CIA et l'US Army avait débuté dès 1963 au laboratoire militaire de Fort Detrick. Ce programme avait mis en chantier des agents infectieux mortels et des substances neurotoxiques avaient été expérimentées. Un biologiste moléculaire, un électricien et un employé du rayon singes de ce même Fort Detrick étaient mystérieusement décédés, durant cette période.
Comme on le voit, les aboutissements joyeux auxquels nous mènent les recherches de la médecine, sont le résultat d'une longue recherche, depuis longtemps dirigée et financée directement par l'Etat. L'exemple des USA est particulièrement parlant lorsqu'on connaît la fonction d'avant-garde de l'organisation locale de l'Etat bourgeois en cette région du monde. Les progrès en biologie moléculaire ont donc directement et de façon permanente, intéressé les scientifiques et militaires américains.
Il doit être clair à ce niveau du texte que la séparation entre scientifiques, industriels et militaires n'est qu'une séparation toute formelle; les recherches en biologie moléculaire, plus spécifiquement axées sur les applications militaires, sont à tous égards intrinsèquement et organiquement unies aux recherches médicales. Le Fort Detrick, dont il est question plus haut, qui constitue le laboratoire militaire de l'US Army, tout près de Washington, dans le Maryland, est directement relié et rattaché à l'Institut National de Cancer, à Bethesda, banlieue de la capitale américaine. Pour argumenter notre propos, nous avons également placé en regard de ce texte un court extrait d'une liste de hauts scientifiques américains, augmenté des places qu'ils occupent dans les Conseils d'Administration de gros trusts pharmaceutiques et des liens qui les unissent au domaine militaire.
Et quant aux normes de sécurité édictées lors de ces conférences honteuses autour de l'éthique médicale à Asilomar, elles furent établies par l'Institut National de la Santé lui-même; c'est ce même institut qui a défini quatre types de laboratoires différents, dont le plus protégé, appelé "P4", est à la fois le mieux équipé... et le plus "militarisé": le premier de ces laboratoires s'ouvre en effet en 1977, dans ce même bâtiment de Fort Detrick. C'est "Vickers", une fabrique d'armement qui l'a conçu et fabriqué!
Voici une brève illustration des liens indissolubles existant entre les scientifiques et le secteur industriel et militaire. Il s'agit d'extraits d'une liste du personnel administratif et enseignant du M.I.T., une université scientifique nord-américaine:Jerry Mc Afee,
-Chemical Engineering Visiting Committee Chair
-Director, McDonnell Douglas Corp.
-Director, Chevron USA.
-Director, American Petroleum Institute...Eugene Edzards Covert
-Director, United Technology.
-Consultant to BBN, Israël, Pratt Whitney.
-Member of NATO Aerospace Policy Committee.
-Consultant, US Army Research Office...John Deutch
-Chairman, Defense Science Board Task Force on Small International Ballistic Missiles.
-Member of Defense Science Board.
-Member of Army Scientific Advisory Panel...Steven Meyer
-Consultant, Central Intelligence Agency (CIA)...Alexander Rich
-Member of Corp Marine Biology Lab WHOI.
-Member of US-URSS Joint Committee on Science and Technology ('77-'81)...La totalité du personnel non universitaire associé au Laboratoire Lincoln du M.I.T. vient de l'industrie militaire ou des secteurs de la Défense (et, la plupartdu temps... des deux à la fois). Toutes les notices ressemblent à celles-ci:
Brent Scowcroft, USAF
-Lieutenant General USAF, 1974.
-Military assistant to President (1972-73)
-Director, Atlantic Council US.
-Director, National Bank of Washington.
-Vice-Chairman, Kissinger Associates, Inc...
En cancérologie, encore, alors qu'on étudie particulièrement entre 1970 et 1975 la réponse immunitaire, les savants dirigent parallèlement leurs recherches vers la découverte d'une arme de destruction massive:
"Nous savons que des chercheurs américains se sont penchés sur la question de savoir s'il serait possible de trouver un type d'arme chimique ou biologique pouvant tuer les gens d'une race et laisser les autres à peu près indemnes. C'est ce qu'on appelle les "armes ethniques". Et certainement, les techniques au service de la génétique et de la biologie moléculaire permettent la mise au point de ce type d'armes."Cette déclaration n'est pas plus issue de "Paris-Match" que d'une feuille de chou ronéotypée gauchiste; il s'agit d'une déclaration faite en 1983 par un biologiste d'audience mondiale, Steven Rose, de l'Open University, un centre britannique de recherche sur le cerveau.
Du "cerveau", il n'en faut sans doute pas beaucoup pour passer sa vie à torturer du singe ou du mouton et en extraire les chimères moléculaires! Et d'"humanité" encore moins, lorsque les recherches délirantes (mais commerciales!) des industriels pharmaceutiques et autres agents étatiques en arrivent à concevoir des "armes ethniques"! Mais comment s'étonner encore des progrès scientifiques, face au chaos chaque fois plus profond dans lequel se débat cette société moribonde, tout juste bonne à se régénérer par la guerre.
La recherche des moyens de destruction, orchestrée par l'Etat, est permanente et remonte aux origines des sociétés de classe. Mais jamais la société n'avait atteint le niveau de barbarie qui est le sien aujourd'hui. Là où ce qu'il reste de raison humaine, aurait tendance à nous faire croire qu'une limite a été atteinte dans les conditions de destruction de l'espèce humaine et de la planète qui la supporte, les infernaux progrès du Capital viennent lui donner tort! On croit avoir atteint le maximum de ce qu'organiquement et matériellement, l'homme est capable de supporter; on se dit que le Capital ne pourra aller plus loin dans sa destruction sauvage des corps et des consciences de l'homme, et un nouveau progrès vient démentir cette illusion.
La Valeur dévore tout! L'Etat met les prolétaires dans des conditions où la simple vente de leur force de travail ne leur suffit plus pour survivre, et les force ainsi à vendre jusqu'à leurs propres organes! Les nécessités de la Science et du Commerce n'ont que faire de la limite humaine, et la repoussent toujours plus loin, en profitant de l'aggravation des conditions de vie des prolétaires. La liberté d'acheter et vendre est la base de la démocratie: pourquoi donc ne pas faire commerce des organes humains que d'aucun choisissent librement de vendre (23)?
Armes chimiques et bactériologiques, armes ethniques, achat (par la Science) et vente (pour survivre) d'organes humains,... On pourrait encore parler des pesticides "ZYKLON", ces gaz utilisés comme armes de guerre et dont les scientifiques qui l'ont délicatement mis au point pourront toujours soutenir après le massacre, qu'ils ignoraient tout de son utilisation. On pourrait encore parler des poisons mis au placard depuis plusieurs années et que les laboratoires, toujours à la recherche de profit, ressortent aujourd'hui grâce au sida (24). On pourrait décrire l'horreur des exécutions scientifiques des condamnés à mort aux USA, etc..., mais aucune liste des barbaries créées par l'insatiabilité des marchands ne suffira à ouvrir les yeux. A quoi bon parler d'horreurs supplémentaires quand l'existence même de la Démocratie capitaliste mondiale produit la monstrueuse contradiction de tuer par la faim plus de cent vingt mille personnes par jour, alors qu'au même moment, la loi de la Valeur contraint les capitalistes à détruire des tonnes et des tonnes de denrées alimentaires!
Ce fait en lui-même recèle toute l'horreur du charnier permanent sur lequel nous vivons, et aucune "prise de conscience" ne viendra changer la réalité: seule la mise en commun grandissante et l'organisation mondiale des révoltes que fait surgir la dégradation permanente des conditions de vie du prolétariat, pourra mettre un terme à l'apocalypse capitaliste.
- Ne vous laissez pas opérer. Le vieux a la manie des expériences Quand il peut avoir quelqu'un pour cela, il ne le lâche plus. Il vous opère les pieds plats et ensuite, effectivement, vous n'avez plus les pieds plats; en revanche, vous avez des pieds bots et il vous faut, pendant toute votre vie, marcher avec des bâtons.- Mais alors que faire? demande l'un des soldats.
- Dire non; vous êtes ici pour guérir vos blessures et non pas pour vos pieds plats. Est-ce qu'au front vous ne les avez pas eus? Ah! voyez-vous, maintenant vous pouvez encore courir, mais, dès que le vieux vous aura tenus sous son couteau, vous serez infirmes. Il a besoin de sujets d'expériences; pour lui, la guerre est, à cause de cela, une époque magnifique, comme pour tous les médecins. Voyez en bas, au centre médical, une douzaine de ces opérés s'y traînent. Plusieurs sont là depuis des années. Pas un seul ne peut marcher mieux qu'avant; presque tous marchent plus mal et la plupart avec les jambes dans le plâtre. Tous les six mois il les rattrappe et il leur brise les os une fois de plus, en disant chaque fois que la guérison va venir.
Extrait de "A l'ouest rien de nouveau", de E-M Remarque, à propos de la guerre '14, '18.
L'Etat s'en cache d'ailleurs très mal et le maximum d'embarras surgit quand on pose la question "tabou" de l'actuelle possibilité matérielle de la fabrication du sida. Pour se défendre de l'origine scientifique, les croyants de la Science n'ont d'autre réponse à opposer... qu'une question: "Mais quel intérêt y aurait-il à développer un virus contre lequel on ne pourrait pas se prémunir?!?". Pour ces curés de la médecine, le sida ne correspond à aucun critère d'efficacité mal intentionnée,... et n'a donc pu être produit par la société!!! Heureusement, l'idéologie de "l'objectivité" tant chantée par la Science a quelques effets matériels sur certains d'entre eux et à la question posée crûment par une journaliste entre 1986 et 1987: "Si le sida n'existait pas, pourrait-on le construire?", le Docteur Brun-Vézinet répond: "Oui, on le peut!". Le Professeur Montagnier répond: "On le pourrait". Le Docteur Chermann toussote. Et le Docteur Alizon nie... pour finalement expliquer que ce serait possible, en y réfléchissant bien et, qu'"il serait même envisageable de fabriquer un agent beaucoup plus infectieux en gardant l'enveloppe capable de reconnaître les lymphocytes et en l'utilisant pour véhiculer un virus bien plus pathogène, tel celui de la grippe; on serait alors à même de provoquer des épidémies foudroyantes" (26)!
Il est donc impossible aujourd'hui de nier l'existence des capacités de la Science à fabriquer de semblables virus, mais ceux-là même qui nous l'avouent, revêtent leur blouse blanche et nous demandent solennellement, de faire abstraction des poisons qu'ils créent, d'oublier leur fonction commerciale et guerrière, de ne pas tenir compte des innombrables "bavures" de laboratoires, d'évacuer de nos esprits la collusion entre les Instituts de recherche sur le Cancer et la Défense Nationale, de ne plus penser aux saloperies bactériologiques qu'ils s'efforcent de concevoir... et de croire en la Sainte Mission de la Science!
On a l'impression d'entendre les amoureux d'un quelconque Dieu nous expliquant que si nous n'y croyons pas, c'est parce que nous n'avons pas la foi, et que si nous voulons avoir la foi,... il faut croire en Dieu. La Religion nous promet le Paradis si nous fermons nos gueules sur terre; et la Science nous assure la guérison, si nous nous laissons faire et fermons les yeux! La Science et la Religion appartiennent à la même famille: la Valeur! L'Etat! L'une comme l'autre ont toujours contribué au maintien du monde tel qu'il est, que ce soit par sa conservation ou son aménagement. Un des moments de cette immobilité dans laquelle ils aimeraient utopiquement figer le monde, est le mensonge pur et simple, l'occultation de la réalité parce qu'elle décrédibilise trop puissamment l'Etat.
En février 1991, était révélé qu'entre 1950 et 1970, un couvent catholique près de Montréal avait été le lieu de viols réguliers commis par une vingtaine de curés sur des enfants d'entre 6 et 15 ans. Les flics étaient au courant depuis le début mais l'Etat a caché, nié et occulté ces faits pour imposer l'ordre chrétien, nécessaire à la cohérence locale de l'Etat, à ce moment. La même chose se passe autour du sida aujourd'hui, mais avec des conséquences autrement lourdes quant à l'enjeu que représenterait "l'aveu". La Science est déjà taxée d'impuissante face à l'impossibilité de guérir; qu'en serait-il si étaient rendues publiques aujourd'hui les connexions entre les projets militaroïdes de la société et l'apparition de cette épidémie mondiale. Non! Face à cela, ces immondes verrues que sont les représentants de la Santé, préfèrent nous débiter leur litanie morale et faire de la "prévention" à propos des excès sexuels "qui le plus souvent, n'apportent rien sur le plan des satisfactions et peuvent, au contraire, amener des ennuis graves, comme le sida, par exemple", dixit le même Professeur Montagnier de l'Institut Pasteur à Paris (27).
Aujourd'hui, toute discussion sur l'origine du sida a plus ou moins été écrasée par l'entreprise idéologique médicale. Le dernier argument pour écarter la moindre tentative de réveiller cette question aux odeurs de souffre consiste à mettre en avant l'importance première de trouver des solutions pratiques au sida: "Discuter sur l'origine du sida, c'est faire de la philosophie, ce qu'il faut, c'est trouver des solutions concrètes". Voilà ainsi justifiée la course à la recherche et au profit. La fuite en avant médicale peut continuer, plus que jamais déterminée par une concurrence commerciale d'autant plus exacerbée que la crise capitaliste s'accentue de jour en jour.
Face à cela, il nous faut briser le mur du silence construit par l'Etat scientifique et resituer l'épidémie du sida dans le contexte réel où elle est apparue: la course capitaliste mondiale à l'accumulation toujours plus concentrée de Valeur.
Le virus du sida n'est pas un accident! Qu'il soit le résultat d'une erreur de manipulation en laboratoire, qu'il s'agisse d'un artefact produit d'un cerveau rendu fou par la Science ou que la chimère provienne directement de l'imbécile recherche d'une arme supplémentaire dans l'attirail délirant des paranoïaques de la Défense Nationale, dans tous les cas, le rétrovirus du sida n'est rien d'autre que le produit d'une société malade de son argent, de sa concurrence, de son commerce! Le sida n'est pas un fléau de Dieu pour nous rappeler à l'ordre moral! Le sida n'est que le résultat d'une logique infernale à laquelle l'humanité est soumise depuis que la Valeur s'est autonomisée sous forme d'une loi soumettant toute relation humaine, toute connaissance nouvelle, toute activité créatrice,... à la stricte dictature du marché mondial.
Les lois de ce marché imposent une guerre permanente de tous contre tous. Les capitalistes se déchirent entre eux pour conquérir les marchés, et ils soumettent ceux-là mêmes qu'ils exploitent --les prolétaires-- à une même guerre sans pitié: "Si tu veux un salaire, bats-toi contre ceux qui te concurrencent sur le marché du Travail"! Dans cette guerre de tous contre tous, la limite que le Capital porte en lui-même en produisant plus de survaleur qu'il n'est capable d'en réaliser, tend à être repoussée par l'infernale compétition à laquelle se livrent les concurrents marchands; cette course au profit les mènent à concevoir et développer, dans tous les domaines, des forces productives "révolutionnaires" leur permettant de dominer telle ou telle partie du marché en vendant à moindre coût.
Le Progrès et la Science viennent ainsi épauler le Commerce en soumettant la connaissance humaine à cette même dictature du marché. La Science ne fonctionne et ne se développe que grâce à d'énormes capitaux débloqués pour orienter ses recherches dans le sens proposé par le capitaliste. C'est à qui trouvera l'arme la plus efficace, propre à intéresser les délires de défense de telle ou telle association capitaliste baptisée "Nation". C'est à qui proposera la machine, la connaissance ou la technique la plus performante pour la production. C'est à qui propulsera le premier sur le marché, des produits pharmaceutiques promettant la disparition du mal de tête ou la repousse des cheveux!
Le virus du sida n'est pas un accident! C'est le résultat des recherches débridées que la Science, aux ordres du Commerce, a lancées pour répondre aux marchés qu'offraient l'industrie pharmaceutique, la bionique, l'électronique moléculaire, l'informatique, etc...
La Science n'est pas non plus un accident. La Science est produit et agent du Capital. La Science est la négation de la connaissance humaine en ce qu'elle part pour son développement des nécessités du développement capitaliste. Elle existe en tant que négation de l'Homme, cherchant à soumettre toute découverte, toute expérience, tout savoir à la démocratique dictature de la Marchandise et de l'Etat qui la défend. Peu lui importe que les médicaments qu'elle crée soient mortellement testés sur des hommes qui l'acceptent parce qu'ils n'ont pas d'autres ressources pour vivre ou dans des régions où ils n'ont même plus la force de gueuler: le but de la Science, c'est le Commerce! La fonction de la Science,... c'est l'Ignorance: en se séparant comme connaissance du commun des mortels et en s'érigeant comme secte divine auprès de l'Etat qui la finance, elle assume, maintient et dirige la séparation entre les hommes et les éléments de connaissance qui leurs sont vitaux. Le prolétariat est ainsi maintenu dans l'ignorance même de son ennemi, de son antagonisme total: le Capital. L'inhumanité à laquelle il est soumis n'a pas de nom et prend la forme d'une calamité: s'il a mal de tête, ce n'est pas parce qu'on l'a fait bosser pendant huit heures,... c'est parce qu'il manque d'aspirine!!!
Ici, nous avons dû nous battre pour qu'aucune de ces hyènes sombres appelées "curés" ne se penche sur toi; nous avons dû nous battre pour imposer, comme cortège, ta véritable "famille", celle des liens de lutte que nous avions forgés ensemble; nous avons dû nous battre, parce qu'à l'heure même de l'incinération, une "grosse légume" quelconque a prétendu prendre plus de place et de temps pour saluer son mort enrubanné; nous avons dû nous battre contre le cirque imbécile de ces pauvres bougres idiots, habillés de gris et payés pour pleurer, tout en accélérant les cérémonies; enfin, nous avons dû nous battre contre le ridicule de ce spectacle morbide entourant pareilles circonstances, et où il est de mise, dans cette société d'anti-plaisir, de faire pleurer la veuve et trouiller les vivants! T'en fais pas camarade, ta mort ne nous a pas fait peur! Elle nous a donné encore plus de détermination dans notre lutte pour abattre définitivement la monstrueuse inhumanité du Capital!
La Science n'aura pas le dernier mot. Déjà, parmi les prolétaires atteints du même poison qui t'a condamné, certains se sont mis à venger leur mort future... en mordant jusqu'au sang les flics et autres agents de l'Etat, qui voulaient les contrôler. "Faire de la maladie une arme"! Comme quoi la résistance du prolétariat produira des parades aux plus tordues des agressions capitalistes!
"Y a-t-il une vie avant la mort?"
Avec toi, camarade, nous répondons par l'affirmative et continuons à défendre que la "vraie vie" réside dans la continuité de la lutte acharnée que nous menons pour nous organiser en une force, déterminée à défaire une fois pour toutes les tristes incontinents qui nous exploitent et à imposer une société sans classe et sans argent!"